IVRY-SUR-SEINE (94) : cimetière parisien
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Perdu parmi les « grands » (Pantin, Bagneux, Thiais), le cimetière parisien d’Ivry fut longtemps le plus méconnu malgré une histoire très intense. C’est au milieu du XIXe siècle, quand les grands cimetières parisiens intra-muros commençaient à donner des signes de trop-plein, que le conseil municipal vota son aménagement. On choisit un ancien champs de navets, sobriquet par lequel on désigna longtemps ce cimetière, et par extension le carré des suppliciés qui s’y trouvait. Il n’est évidemment parisien qu’administrativement . En outre, et ce n’est pas la moindre de ses complexités, il est divisé en deux : la première partie, qui date de 1861, couvre une superficie de 7,69 hectares, tandis que la seconde, avec ses 20,69 hectares, a été créé en 1874. Quasiment le même âge donc, même si on parle souvent de « l’ancien » et du « nouveau cimetière ». A quelques encablures se trouve également le cimetière du Kremlin Bicètre, dont l’histoire est intimement lié à celui d’Ivry puisque cette parcelle, rachetée tardivement par la nouvelle commune du kremlin, avait été la parcelle acheté par la capitale initialement pour y inhumer les condamnés à mort ! Complexe, c’est un fait... !
Aujourd’hui, la nécropole totalise 48 000 concessions, réparties en 47 divisions. 240 000 personnes ont été enterrées à Ivry. C’est un cimetière un peu triste, lieu d’inhumation des déclassés qui n’eurent pas droit aux ors des cimetières intra-muros. Paris y déversa les victimes de ses drames à bonne distance du périphérique. Pour les taphophiles, il est un lieu de recherches et de trouvailles, dans une collaboration tout à fait fertile avec l’ancien conservateur du lieu, Benoît Gallot, désormais au Père Lachaise, qui a énormément fait pour faire connaître le patrimoine funéraire de « son » cimetière. D’autres découvertes viendront, c’est évident.
Marie-Christine Penin, dont le site n’est plus à présenter, et auquel je renverrai plusieurs fois dans mon article, a fait de ce cimetière son « chouchou » d’investigations. Elle a notamment énormément travaillé sur la période - peu connue, car sensible - des tombeaux politiques de la Seconde Guerre mondiale : ceux des victimes de l’occupation tout d’abord, puis ceux de l’épuration. Elle présente dans plusieurs articles de son site les résultats de ses recherches passionnantes.
Le cimetière parisien d’Ivry possède deux caractéristiques qui font son identité, son histoire, et son intérêt : la présence du carré des suppliciés et celle des cimetières militaires, attestant comme nulle part ailleurs des heures sombres de l’occupation.
On n’oubliera pas non plus les très nombreux communards qui furent inhumés ici dans les jours qui suivirent la semaine sanglante. Aucun monument ne mentionne leur mémoire, mais le cimetière d’Ivry fut sans doute celui qui en recueillit le plus de la capitale, intra ou extra muros.
Le carré des suppliciés
Dans son site Tombes et sépultures, Marie-Christine Penin a dressé un tableau synthétique rigoureux des lieux d’inhumations des suppliciés parisiens : je renvoie à cet excellent article pour permettre de comprendre pourquoi, à partir de 1885, et après une vingtaine d’années dans l’enclave qui est désormais le cimetière du Kremlin Bicètre, on inhuma les condamnés à mort dans le cimetière parisien d’Ivry.
De la même manière, ce serait faire injure à ces recherches que de paraphraser son intéressante étude sur la manière d’inhumer les corps des condamnés, après un « simulacre » d’obsèques : là encore, je renvoie à son site.
Globalement donc, trois voies étaient possibles pour le devenir des corps suppliciés :
la remise à la famille, sous certaines conditions (création d’une tombe discrète et quasi anonyme)
le corps était -discrètement- « confié » à la faculté de Médecine
le corps était inhumé dans le carré des suppliciés de ce cimetière.
Il convient d’ajouter, si on veut être tout-à-fait précis, que certaines affaires criminelles « fameuses » se déroulèrent en dehors de la capitale, et que dans ce cas, les lieux d’inhumation furent autres : j’en ai présenté quelques cas dans ce site, comme Landru et Weidmann à Versailles, Christian Ranucci à Avignon...
Etrange que ce « carré » : sans information, vous passez devant sans même vous en rendre compte. On ne peut en revanche s’empêcher d’éprouver un petit frisson à la vue de ce quadrilatère de pelouse, délimité uniquement par un différentiel de la couleur de l’herbe, lorsque l’on sait quelle était sa fonction !
- Le carré des suppliciés
Rappelons que la fin de la peine de mort signifia évidemment celle du carré des suppliciés. On exhuma - sans aucun doute de manière assez superficielle - les restes qu’il contenait pour les déposer à l’ossuaire du cimetière parisien de Thiais, avant que la plupart ne prennent la direction du crématorium du Père Lachaise.
Pour l’essentiel cependant, les « vedettes » de la guillotine terminèrent leurs parcours à Ivry. On ne saurait toutes les citer, mais nous mentionnerons cependant les plus connues :
En 1894, l’anarchiste Auguste Vaillant auteur d’un attentat à la Chambre des Députés. Le refus de le gracier du président Sadi Carnot entraîna l’assassinat de ce dernier par l’anarchiste Caserio (qui fut guillotiné mais dont les restes se trouvent à Lyon).
En 1913, a priori plusieurs membres de la bande à Bonnot (seul André Soudy semble y avoir été déposé de manière certaine, mais peut-être également Raymond Callemin et Antoine Monier. D’autres sources les disent « récupérés » par la faculté de Médecine).
En 1932 Paul Gorgulov, assassin du président Doumer [1].
En 1943, on y déposa le corps de la faiseuse d’anges Marie-Louise Giraud, condamnée par le régime de Vichy, et immortalisée bien plus tard par Isabelle Huppert dans le film de Chabrol Une affaire de femmes.
Le très fameux docteur Marcel Petiot en 1946.
En 1956 le gangster Emile Buisson, du « gang des Tractions Avant » (incarné par Jean-Louis Trintignant dans le film Flic Story).
En 1972, le procès de Claude Buffet et de Roger Bontems, défendu par Robert Badinter, fit grand bruit. Leur condamnation (et le refus de gracier Bontems qui n’avait tué personne) fut déterminante dans le processus de l’abolition. Tous deux furent amenés à Ivry : le corps de Bontems fut récupéré par la famille et repose désormais dans son village natal d’Aydoiles, dans les Vosges. Jusqu’à preuve du contraire, celui de Bontems repose toujours ici.
Le souvenir des fusillés
Quatre divisions du petit cimetière, particulièrement contre les murs d’enceinte, sont constituées de cimetières militaires (de la Première et de la Seconde guerre mondiale) comme c’est le cas dans de nombreuses nécropoles. Plusieurs carrés s’y succèdent : Allemands, Italiens, ou encore Maghrébins. On signalera la présence d’un monument aux morts italiens réalisé en bronze par Alfred Pina.
La particularité du cimetière est l’omniprésence des fusillés civils qu’il contient. Près de 1500 personnes furent fusillés à Paris durant la guerre (résistants, juifs, otages, et communistes, qui payèrent un lourd tribut), sur différents sites dont le plus important fut le fort du Mont Valérien. Les dépouilles de ces fusillés, afin d’en atténuer l’effet mais également d’en faire des martyrs, furent disséminées dans toute la région parisienne (et dans Paris intra-muros : voir par exemple une partie du mur du columbarium du Père Lachaise).
Plus de la moitié de ces fusillés se retrouvèrent à Ivry. Ils furent la plupart du temps inhumés dans des fosses, mais en furent exhumés dès la Libération et, pour la plupart, disposent aujourd’hui de tombes individuelles et identifiées (plusieurs tombes signalent cependant des « inconnus »).
La présence de ces fusillés est signalée par de nombreux lieux du cimetière :
- la moitié de la 42ème division se présente sous la forme d’une pelouse. En réalité, comme le signale une stèle dans la partie centrale inaugurée en 2003, de part et d’autres se tenaient des fosses de fusillés.
- Le mur de la 39ème division est recouvert de plaques témoignant des exécutions, autant de témoignages individuels, mais également une large stèle rappelant que « 828 résistants furent ensevelis dans le carré des fusillés ».
- A l’angle que forme la 39ème division, un monument est dédié aux fusillés du Mont Valérien.
- La présence la plus emblématique, parmi les fusillés, est celle des membres du groupe Manouchian.
- A l’entrée du grand cimetière, une statue (la plus monumentale du lieu) passe pour être celle d’un résistant venant d’être fusillé (tombe Triolo).
curiosités
L’entrée des cimetières parisiens périphériques (Saint-Ouen, Batignolles, Ivry, Pantin), aménagés souvent à la même époque, se ressemblent : d’un boulevard principal part une allée sans issue qui mène à la porte du cimetière. Ses allées, souvent plantées de platanes, voient défiler de part et d’autres des bâtiments de conservation, des marbriers et des fleuristes. Certains de ses immeubles, souvent en biques, ont un certain cachet comme c’est le cas ici.
La tombe de Max et Madeleine GOA, tués en 1944 dans des circonstances dramatiques.
Si le cimetière d’Ivry est loin d’être le plus riche en ornementations, il en possède néanmoins.
- Tombeau du philanthrope Chambarasquit (div9)
- Œuvre de Grandigneaux
- Tombeau Bordereau
- Œuvre de Roger Prat
- Tombeau Hamon
- Tombeau Nobecourt
- Œuvre de Levasseur
- Tombeau Kremer
- Œuvre de Charles Pourquet
Célébrités : les incontournables...
Arlette ACCART
Marcelle BORDAS
Marcel BOURDARIAS
Marius CONSTANT
Geneviève de FONTENAY
Johnny HESS
Missak MANOUCHIAN
Lazare PONTICELLI
Pierre et Fanny PRINS
Roger STÉPHANE
Louis SEIGNER
Gabriel PÉRI (1902-1941) fut-il inhumé dans ce cimetière, comme le laisse entendre le poème d’Aragon ? Probable, mais sans preuve concrète, comme le souligne l’enquête minutieuse menée par Marie-Christine Penin.
Ce cimetière fut pour pas mal de monde une étape avant un transfert vers une destination définitive
Emile Prisse d’Avennes y reçut sépulture avant un transfert au cimetière Montparnasse en 1889.
Max Jacob avait été inhumé dans la 44ème de ce cimetière, avant d’être transféré en 1949 à Saint-Benoît-sur-Loire.
Les étudiants du Lycée Buffon furent inhumés ici avant leur transfert en 1952 à la chapelle Sainte-Ursule de La Sorbonne.
Antonin Artaud y reposa également avant son transfert en 1975 à Saint-Pierre de Marseille.
Le communard Fortuné Henry et son fils exécuté, l’anarchiste Emile Henry, y reposèrent jusqu’à ce que leur épouse et mère les transfèrent à l’ancien cimetière de Brévannes de Limeil-Brévannes (94).
Le poète polonais Cyprian Norwid y reposa de 1883 à 1888 avant d’être transféré au cimetière des Champeaux de Montmorency (95).
... mais aussi
Arthur ADAMOV (Arthur Adamian : 1908-1970) : écrivain et auteur dramatique français d’origine russo-arménienne, il fut l’auteur d’un théâtre, d’abord influencé par le surréalisme, puis rattaché au courant du théâtre de l’absurde. Subissant ensuite l’influence de Brecht, il écrivit des œuvres ouvertement « politisées ». Il publia L’aveu en 1946, confession où il exprime son sentiment d’humiliation et son sentiment d’impuissance. Les événements de la guerre d’Algérie le conduisirent à rejoindre le parti communiste. Il mourut des suites d’une overdose de barbituriques. Sa tombe fut pendant longtemps totalement anonyme, tout au plus certains fidèles de son œuvre déposaient sur le sol un bout de bois, un cailloux, qui indiquaient, maladroitement écrite, cette identité, mais ces témoignages disparaissaient presque aussitôt. Une plaque plus pérenne identifie désormais sa tombe (div 44).
Jean BELLUS (1911-1967) : illustrateur et dessinateur de presse, il collabora à plusieurs revues et à la presse quotidienne. Il était surtout connu pour son personnage de Clémentine chérie (dont on fit un film), et pour sa chronique Une famille bien française, peinture désormais colorée et nostalgique des années 60. Sa tombe est totalement anonyme (div 24).
L’ écrivain de langue française et de nationalité algérienne Abdel Hafed BENOTMAN (1960-2015). Condamné à plusieurs reprises pour vols et braquages de banques et ayant fait plusieurs séjours en prison, il en ramena la matière pour des romans policiers. Il fut également l’auteur de nouvelles, de poésies, de chansons, de pièces de théâtre et de scénarios de films (div 16).
René BERGERON (1890-1971) : comédien français, il tourna beaucoup pour le cinéma des années 30 (Pépé le Moko…), souvent dans les rôles d’inspecteurs. Sa carrière fut brisée en raison de sa compromission dans la collaboration aux cotés de Robert Le Vigan. Il ne revint sur les écrans que dans les années 50, pour des rôles très secondaires (div 20).
Paul BERNARD (1898-1958) : comédien, il fut attitré aux rôles d’assassins et de traîtres séduisants mais glacés. Le théâtre lui apporta des rôles plus variés et plus épanouissants (div 11).
Marcelle BORDAS (1897-1968) : Elle travaillait dans la confection de chapeaux de théâtre, ce qui lui permit de rencontrer de nombreux artistes. Elle débuta en 1933 aux Folies-Bergères dans Folies en folie, revue menée par Mistinguett et Fernandel. Elle se spécialisa dès 1935 dans les chansons traditionnelles (« Ma femme est morte », 1935) et les reprises de Thérésa (« La femme à barbe »). De 1935 à 1938, elle se produisit sur la scène de l’ABC, de l’Alhambra, et passa régulièrement sur les ondes. Elle créa en 1940 « Ah ! Que la France est belle ! » : de ce fait, elle participa au mouvement de rénovation nationale lancé par le Maréchal Pétain. A l’inverse, en juillet 1945, elle interpréta « Les Africains », chant de guerre des soldats africains qui venaient délivrer la France. Après la guerre, elle revint à un répertoire constitué d’airs de marins et de soldats (div 30).
Jules BOUCHER (1902-1955) : écrivain, occultiste et alchimiste ! Il fit partie des auteurs de la mouvance occultiste et symboliste de la franc-maçonnerie dont La symbolique maçonnique, publiée pour la première fois en 1948, connut un réel succès. Disciple de l’alchimiste Fulcanelli, il fut le fondateur, en 1948, de l’Ordre Martiniste Rectifié. Inhumé dans la 45ème division du cimetière, il fut exhumé en 1989.
Charles BOUILLAUD (1904-1965) : un des fameux troisième couteaux du cinéma français, des années 30 à sa mort. Il comptabilisa plus de 130 films, en particulier avec André Berthomieu. Son identité est quasiment illisible sur sa tombe, et il faut vraiment l’énergie entêtée d’un taphophile pour aller le débusquer (div 17) !
Irène BRILLANT (Mathilde Sylvestre : 1906-1997), comédienne qui joua 20 ans à la Comédie-Française. Elle fit également quelques films dans les années 30, alors qu’elle était l’épouse de l’aviateur René Fonck, mais sa proximité avec le régime de Vichy mit un terme à sa carrière après la guerre. Sa tombe est totalement illisible (div 11).
Georges BRIQUET (1898-1958) : journaliste sportif français, surnommé le « roi des radio-reporters », il fut, après avoir été pigiste au Miroir des Sports, l’une des grandes voix de la radio française des années 1930 aux années 1950 en compagnie notamment de Roger Couderc, Robert Chapatte et Thierry Roland. Outre ses reportages sportifs, Briquet assura également le commentaire d’autres types de programme comme le tirage de la loterie nationale, ou des programmes de variétés comme le radio crochet du Poste Parisien L’heure des amateurs qui révéla notamment Bourvil. Il participa également à la distribution de plusieurs films. Il refusa la collaboration, fut suspecté, et fut finalement déporté à Dachau. Il devint en 1945 chef du service des sports de la radio nationale (RDF puis RTF à partir de 1949), et anima l’émission Sport et musique du dimanche après-midi, qui, sur quatre heures, suivait les grands rendez-vous du sport dominical. La grande différence entre le style de Briquet et des autres commentateurs officiant alors était son débit. Briquet parlait vite, donnant du rythme à ses interventions tandis que les autres commentateurs parlaient lentement en articulant bien afin de se faire bien comprendre par tous. Briquet était également le roi de l’improvisation, et ne limitait pas ses commentaires aux seuls faits sportifs. Il adorait s’attarder sur la description d’un paysage ou des à-côtés de l’évènement (div 42).
Le peintre Robert CAILHOL (1893-1988) (div 45).
Le coureur cycliste Louis CAPUT (1920-1985), qui, professionnel de 1942 à 1957, fut champion de France sur route en 1946 et remporta Paris-Tours en 1948. Il fut directeur sportif de 1966 à 1978. Son nom n’est plus lisible sur sa pierre tombale (div 44).
- 2023 : nouvelle tombe
Le musicien auvergnat Martin CAYLA (1889-1951), qui fut également éditeur de musique (div 7).
Costin CAZABAN (1946-2010) : compositeur roumain installé en France en 1983, il fut professeur d’analyse et écriture à l’École supérieure de musique Georges Enesco (Bucarest, 1971–1983), puis chargé de cours pour les universités Paris I (1985–1995 et 1998–1999), Paris III (1998–2002) et Paris IV (2000–2002). Enfin, à compter de 2002, il enseigna à l’université Lumière–Lyon 2 où il fut nommé maître de conférences. Ses travaux portent avant tout sur l’élaboration d’un système de composition et d’analyse musicale fondé sur la logique dynamique du contradictoire (div 16).
André CHASTEL (1912-1990) : historien de l’art français, auteur d’une importante œuvre sur la Renaissance italienne, professeur au Collège de France où il fut titulaire de la chaire d’art et civilisation de la Renaissance en Italie, de 1970 à 1984, il fut élu membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres en 1975. Proche d’André Malraux à l’époque où celui-ci était chargé du ministère des Affaires culturelles, André Chastel fut à l’origine, avec l’historien Marcel Aubert, de la création de l’Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France (div 9).
Michel CRUGER (1915-1979) : ouvrier polonais, il s’engagea dans la Légion étrangère et servit en Afrique du Nord. Il participa en 1940 aux combats en Norvège, où il fut blessé à l’attaque de Narvik. Replié sur Londres, il rallia les FFL : il participa alors à toutes les campagnes de Syrie, de Libye, d’Egypte et de Tunisie, puis aux libérations de l’Italie et de la France avec la 1èreDB. Il fut fait Compagnon de la Libération (div 39).
Maurice CUVILLIER (1897-1957) : illustrateur de BD français, il créa de nombreux personnages mais ceux qui connurent le plus de succès furent à l’évidence Sylvain et Sylvette, racontant les aventures de deux enfants, frère et sœur, qui, perdus dans une forêt, se réfugient dans une maison abandonnée, recueillent différents animaux devenus leurs amis, et doivent se défendre contre d’autres animaux dangereux. Maurice Cuvillier assura la réalisation des albums de sa création jusqu’à sa mort : son œuvre fut ensuite poursuivie par Jean-Louis Pesch. Sa tombe est ornée d’une très belle plaque émaillée qui reproduit ses petits personnages (div 14).
Prudent René DAGRON (1819-1900) : pionnier de la photographie, il installe à Paris son studio qui connut un grand succès, lui permettant de devenir photographe officielle de la famille impériale. Il est surtout connu pour avoir été, en 1859, le premier à breveter un procédé de microfilms : ainsi, à l’exposition universelle de 1867, il fixa sur un millimètre carré de pellicule le portrait de 400 députés ! Son procédé fut utilisé durant la guerre franco prussienne de 1870 pour envoyer de nombreux documents sur des petits supports. Il est regrettable de constater que sa tombe est devenue totalement illisible (div 10).
le journaliste Pierre DAIX (1922-2014), ancien résistant et déporté, auteur de nombreux ouvrages sur l’art au XXème siècle, était un spécialiste de son ami Pablo Picasso. Il fut aussi l’auteur de nombreux romans comme La Dernière Forteresse (1950). A la Libération, il devint chef de cabinet du ministre communiste Charles Tillon, rédacteur en chef de la revue Les Lettres Françaises (1948-72), puis directeur adjoint du quotidien communiste Ce Soir (1950-53). Trente ans plus tard, il fut conseiller de la rédaction du Quotidien de Paris (1980-85), journal classé à droite : face au stalinisme, il avait rompu avec le communisme. Marié avec la fille d’Arthur London, il repose dans une tombe distincte de ce dernier (div 44).
Lucien DALSACE (Louis Chalot : 1893-1980) : comédien de théâtre, comme beaucoup d’autres, il ne sut pas vraiment franchir le seuil du cinéma parlant. C’est ainsi que sa filmographie prit fin avant la Seconde Guerre mondiale. Il tint par la suite une parfumerie et un salon de coiffure Boulevard Saint-Germain à Paris. Avec lui repose son épouse Jane MARCEAU (Jeanne Marceau : 1896-1981), qui fut comédienne de music-hall (div 10).
La mystique spirite Léontine DATRY (1862-1928) (div 9).
Le conseiller municipal Emile DESLANDRES (1866-1935), dont j’indique la présence dans la mesure où il donna son nom à l’une des rues du XIVe arrondissement de Paris où il était élu. Sa tombe est ornée d’un bas-relief fort défraîchi (div 10).
Le peintre naïf Ferdinand DESNOS (1901-1958) (div 13).
Le nageur Emile Georges DRIGNY (1883-1957), qui participa aux Jeux olympiques en 1920 au sein de l’équipe de France de water polo. En parallèle il commença une carrière de dirigeant sportif au sein de la Fédération française de natation et de sauvetage. C’est ainsi qu’il fut en 1924 organisateur des épreuves de natation aux Jeux Olympiques. Il fut en 1926 l’un des principaux membres fondateurs à Budapest de la Ligue européenne de natation dont il devint président de 1938 à 1948. Membre du Comité international olympique, il était également journaliste au Miroir des Sports. La piscine Georges Drigny situé rue Bochart de Saron (Paris 9e) rend hommage à ce grand sportif qui révolutionna la natation française (div 8).
Roger DUMONT (1898-1943) : formé dans l’aviation, il rejoignit la France Libre dès juillet 1940. Il prit par à l’une des opérations les plus prépondérantes de la guerre : la destruction d’une des plus importantes stations radar sur les côtes de la Manche, mais également le vol de certaines de ses pièces pour en savoir plus sur l’état d’avancement de la technologie allemande. Ce fut un franc succès et l’un des premiers exemples aussi réussi de collaboration entre les FFL et la Résistance. Quelques mois plus tard, il fut arrêté et fusillé au Mont Valérien. Il fut fait Compagnon de la Libération (div 39).
Le peintre d’origine néerlandaise Nicolas EEKMAN (Nikolaas Mathijs Eekman : 1889- 1973), qui fut aussi graveur et illustrateur. Installé en France en 1921, il participa à la vie artistique parisienne alors au cœur du quartier de Montparnasse et fréquenta l’ensemble de l’élite artistique de son époque. Son œuvre développa un expressionnisme teinté de cubisme, puis de fantasmagorie, sa technique s’apparentant à celle du XVIe siècle flamand : facture lisse et minutieuse, exacerbation linéaire et expressive de la figure (div 21).
La violoniste Jane ÉVRARD (Jeanne Chevallier : 1893-1984) qui devint dans les années 30 la première femme chef d’orchestre. Mieux : elle créa sa propre formation, l’Orchestre féminin de Paris, qui connut un énorme succès rapidement. Une place parisienne porte désormais son nom (div 6).
Le ténor wagnérien Fernand FANIARD (Fernand Smeets : 1894-1955), qui passa beaucoup sur les ondes mais ne laissa quasiment pas d’enregistrements (div 32).
Louis Gabriel GAUNY (1806-1889) : menuisier proche des milieux saint-simoniens, il publia des articles et des poèmes dans diverses revues. Ses écrits furent publiés pour la plupart après sa mort, véritables témoignages de la condition ouvrière au XIXe siècle et du désir de s’en extraire. Non seulement il sensibilisa à l’aliénation des ouvriers et aux conditions de vie, mais il fut également sensible à la cause féministe. On le surnomma « le philosophe plébéien ». Sa tombe n’a pas été retrouvée par la conservation (div 11).
Le psychologue René GILLE (1907-1957), directeur du Centre Départemental d’Orientation Professionnel de la Seine, qui laissa son nom au « test mosaïque », mis au point par lui, et qui fut la base des grandes enquêtes sur le niveau intellectuel des enfants. Il repose sous un bas-relief en bronze le représentant par Pierre Turin (div 14).
Le pilote de formule 1 Yves GIRAUD-CABANTOUS (1903-1973), qui courut de 1950 à 1953, participant à treize championnats du monde. Il participa également à de nombreuses épreuves ne comptant pour aucun championnat (div 21).
Natalia GONTCHAROVA (voir Larionov)
Le chanteur Bernard HAILLANT (1944-2002), qui reçut le Grand Prix International du Disque de l’Académie Charles-Cros pour son album Des mots chair, des mots sang en 1982. Son épitaphe : Qu’il est beau. L’homme qui pleure. Qu’il est doux. Qu’il est chaud. L’homme qui pleure. Devant vous tiré de l’une de ses chansons (div 19).
Rudolf HILFERDING (1877-1941) : théoricien marxiste et homme politique allemand d’origine autrichienne, il fut l’auteur du Capital financier (1910), œuvre importante dans l’histoire du marxisme, dans laquelle il met en valeur la notion de capitalisme monopolistique. Ministre des Finances de la République allemande en 1923 puis en 1928-1929, il s’exila après l’arrivée au pouvoir de Hitler, et prit part à la Résistance allemande au nazisme. Arrêté en France pendant l’occupation, il fut livré à la Gestapo par la police française, puis mourut peu après en prison. iIl semblerait qu’il ne soit plus dans ce cimetière.
L’historien du CNRS Georges JAMATI (1894-1954), qui inscrivit le théâtre dans le cadre de l’histoire des sensibilités. Il donna son nom à un prix, récompensant l’auteur d’un ouvrage, soit inédit, soit publié dans les deux dernières années, et traitant de l’esthétique théâtrale (div 15).
Le comédien JEAN-MAX (Jean Max Mehouas : 1894-1970), qui appartint à la troupe de Firmin Gémier. Il intervint également au cinéma dans des seconds rôles invariablement antipathiques (div 44).
Le peintre américain Francis Morton JOHNSON (1878-1931), qui vint s’installer à Paris pour suivre les cours de Laurens à l’Académie Julian. Il fut aussi connu pour avoir inventé un dispositif pour l’enregistrement de la voix humaine sur les films cinématographiques en 1919. Sa plaque épitaphe précise que « malgré son dévouement bien connu, l’œuvre des méchants le fit devenir complètement aveugle, muet, paralysé, martyr de la science) » (div 11) !
Fernand KOLNEY (Ferdinand Pochon de Colnet : 1860-1930) : écrivain proche du mouvement libertaire, romancier polémiste ; il fut également spécialiste de la littérature libertine des XVIIe et XVIIIe siècles. Il était le frère d’Eugénie Pochon, épouse de Laurent Tailhade. Il repose dans la sépulture Bublens-Castex (div 1).
Le peintre et décorateur russe Michel LARIONOV (1881-1964), dont le style évolua de l’impressionnisme au fauvisme. Il fut l’un premiers animateurs de l’avant-garde en Russie, se lia avec Kasimir Malevitch, et fonda plusieurs groupements d’artistes. En 1914, il s’installa à Paris, se consacrant à des décors pour les Ballets russes de Serge de Diaghilev, qu’il réalisa entre 1915 et 1922. Il ne retourna jamais dans son pays natal après la révolution bolchévique de 1917. Il repose avec son épouse, Natalia GONTCHAROVA (1881-1962), autre peintre russe célèbre, avec qui il élabora, dès 1909-1910, les fondements du rayonnisme, dont il écrivit le manifeste en 1912. A Paris, ils reçurent l’appui des époux Delaunay (div 7).
L’acteur Charles LAVIALLE (1894-1965) qui collectionna les petits rôles au cinéma, comme chauffeur de taxi, fossoyeur, entrepreneur de pompes funèbres, réceptionniste… Il s’est également illustré maintes fois au théâtre et dans des téléfilms. On a pu le voir en particulier, à de nombreuses reprises, dans la série télévisée Les Cinq Dernières Minutes. Sa tombe est totalement illisible (div 23).
L’abbé Eliphas LEVI (Alphonse Constant : 1810-1875), qui évolua vers le socialisme puis vers l’occultisme. Il connut la prison en raison de ses publications, et connut une certaine audience de son vivant. Une simple croix de bois marqua l’emplacement de sa tombe. En 1881, sa dépouille fut exhumée et jetée à la fosse commune.
Artur LONDON (1915-1986) : entré à 14 ans aux Jeunesses communistes, ancien des Brigades internationales, résistant en France dès 1940, Arthur London fut l’un des trois chefs historiques de la « MOI ». Il fut déporté à Mauthausen en 1942. Nommé en 1949 vice-ministre des Affaires étrangères de Tchécoslovaquie, il fut arrêté en 1951 et fut l’un des quatorze accusés du procès de Prague en 1952, à qui l’on arracha des aveux de « conspiration contre l’État » qui se révélèrent plus tard fabriqués. Réhabilité en 1956, il publia en 1956 l’Aveu dont Costa-Gavras réalisa un film du même nom en 1970 (div 45).
Le photographe français d’origine roumaine Eli LOTAR (Eliazar Tedoresco : 1905- 1969), membre du Groupe Octobre de Jacques Prévert, qui travailla avec de nombreux cinéastes comme photographe ou cameraman (div 44).
L’écrivain et penseur anarcho-socialiste breton Emile MASSON (1869-1923). En 1914, comme Jean Jaurès, il plaida pour la paix. Pendant la Première Guerre mondiale il continua son combat pacifiste, entretenant une correspondance régulière avec Romain Rolland. Sa tombe n’a pas été retrouvée par la conservation (div 45).
Le prestidigitateur Agosta MEYNIER (Auguste Meynier : 1861-1942) qui structura syndicalement cette profession. Il publia diverses revues de prestidigitation (div 7).
Louis MOULINET (1925-2006) : militant puis permanent de la Jeunesse ouvrière chrétienne, il fut député PS de Paris de 1986 à 1988 (div 40).
Liane MOZÈRE (1939-2002) : sociologue et féministe française née en Chine, signataire du Manifeste des 343, elle s’illustra dans l’activisme féministe durant les années 60-70. Elle enseigna la sociologie à l’université de Metz, ses axes de recherche tournant autour de la petite enfance, du travail informel, du travail au féminin. Ses travaux ont été influencés notamment par le pensée de Deleuze et Guattari (div 16).
Albert OUZOULIAS (1915-1995) : militant communiste et résistant français (sous le nom de Colonel André). Lorsqu’en 1942 Charles Tillon unifia les trois organisations d’obédience communiste (les Bataillons de la Jeunesse, l’Organisation spéciale et la Main d’Œuvre Immigrée-MOI) dans les Francs-tireurs et partisans (FTP), il fut nommé commissaire militaire national chargé des opérations. Il rencontra alors régulièrement le colonel Henri Rol-Tanguy, responsable des FTPF de l’Île-de-France, et, dans la nuit du 10 août 1944, fut l’un des signataires de l’affiche appelant à l’insurrection générale. Il fut après la guerre un élu municipal (div 41).
Le chansonnier et parolier Léonce PACO (Gaston Coullerez : 1886-1924) qui exerça dans les cafés-concertes montmartrois. Il se suicida après avoir tenté de tuer sa femme dans une crise de jalousie. Sa tombe fut sans doute reprise (div 19).
L’accordéoniste et compositeur Louis PÉGURI (1895-1972) qui avec ses frères aînés Michel et Charles fit partie de la première génération d’accordéonistes à promouvoir l’accordéon en tant qu’instrument de musique à part entière. Il fut de 1918 à 1925 l’accompagnateur de Mistinguett au Casino de Paris. Il dirigea également son propre orchestre de bal musette. En 1924, il inventa pour le bandonéon le système uni-sonore à la main droite, conçu d’après le clavier italien de l’accordéon (div 42).
La comédienne Mireille PERREY (Mireille Perret : 1904-1991), qui fit partie de la troupe de la Comédie-Française de 1942 à 1947. Elle tourna également pour le cinéma, mais sa carrière n’y fut pas particulièrement mémorable (div 8).
Eugène RUBENS-ALCAIS (1884-1963), militant sourd dans le secteur sportif qui fut le créateur de plusieurs clubs sportifs pour sourds-muets, d’un journal Le Sportman Silencieux (1914), de la Fédération Sportive des Sourds-Muets de France (1918, aujourd’hui fusionnée avec FFH), des Deaflympics (1924), et du Comité International des Sourds Silencieux (1924, aujourd’hui Comité International des Sports des Sourds). On lui donna le surnom de baron de Coubertin des sourds-muets (div 5).
Le peintre et sculpteur Hector RUFFATO (1877-1958) (div 29).
Joseph SANGUET (1848-1921), inventeur de plusieurs instruments de mesures dont le tachéomètre, appareil toujours utilisé en topographie dans toutes les opérations de lever de terrain (lever topographique), dans divers types de travaux dans les domaines des BTP et de l’industrie (notamment l’aéronautique) ainsi qu’en archéologie (div 10).
Le peintre russe Nicolaï SINEZOUBOFF (1891-1956), qui fut professeur aux Beaux-Arts de Moscou (div 14).
Le peintre portraitiste roumain Eustache STOENESCU (1885-1957), qui fut à Paris l’élève de Bouguereau et de Laurens (div 15).
Le ténor belge José de TRÉVI (Joseph Willemsen : 1890-1958) (div 14).
Maurice ULRICH (1925-2012), qui fut directeur de cabinet de Jacques Chirac quand celui-ci était Premier ministre. Sénateur de Paris de 1993 à 2004, il fut également PDG d’Antenne 2 de 1978 à 1981 (div 8).
Le nationaliste Henri VAUGEOIS (+1916), qui n’a pas été retrouvé par la conservation.
Boris VILDÉ (1908-1942), linguiste et ethnologue au Musée de l’Homme, spécialiste des civilisations arctiques ; il cofonda et dirigea l’un des premiers mouvements de résistance, qui se désigne comme « Comité National de Salut public » et fut ensuite connu sous le nom de Réseau du Musée de l’Homme. Il fut arrêté peu après avec plusieurs membres du réseau, puis fut fusillé au Mont Valérien (div 39).
Le sculpteur russe Serge ZELIKSON (1890-1966), père du chanteur Armand Mestral.
Merci à :
Photo Chastel : Marie-Christine Penin.
Photo Datry : Oedipa de la Bergamote.
Photos Benotman, Bernard, Boucher, Brillant, Cayla, Daix, Desnos, Faniard, Haillant, Jamati, Kolney, Lavialle, Lotar, Meynier, Mozere, Ouzoulias, Peguri, Perrey, Ribens-Alcais, Ruffato, Sinezouboff, Stoenescu, Trévi, Zelikson : Jean-Michel Albert.
Nouvelle photo Caput : Olivier Camus.
photo Cruger : Didier Brunet
[1] Il fut transféré deux semaines après son exécution au cimetière de Thiais par sa famille. Il ne reste plus rien de son tombeau.
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