Bretagne : ces sept cimetières et lieux de mémoire pas comme les autres
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Cimetière de Landévennec, mur des disparus, tombe du bandit Saint-Lénard... On vous emmène dans 7 cimetières et lieux de mémoire bretons avec l’écrivain et journaliste Bernard Rio.
À l’occasion de la Toussaint, l’écrivain Bernard Rio, auteur de Cimetières et autres lieux de mémoire en Bretagne, a sélectionné pour Le Pays Malouin sept sites dont il parle dans son livre, paru aux éditions Ouest-France en 2021.
1. Le cimetière de Landévennec
- L’abbaye de Landevennec. ©Jean-Claude Meslé
À Landévennec (Finistère), les morts regardent vers la mer ou plus exactement vers l’Aulne maritime que saint Gwennolé traversa à pied sec, selon le récit qu’en fit son hagiographe Gurdisten, abbé de Landévennec vers 860, soit quatre siècles après l’arrivée supposée du saint à Lan-Towinnoc.
Les archéologues ont confirmé l’ancienneté de la fondation monastique au tournant du Ve et du VIe siècle, quant aux historiens ils ont comparé le passage du saint « par le lit asséché de la mer » à la traversée de la Mer Rouge par Moïse.
Le petit cimetière où les places sont comptées enserre l’église Notre-Dame où une sirène trône sur un rampant.
2. Le mur des disparus
- Le mur des disparus à Ploubazlanec. ©Jean-Claude Meslé
À l’origine, la célébration des « péris en mer » avait lieu dans la chapelle Notre-Dame de Perros-Hamon surnommée la chapelle des Islandais par Pierre Loti (1850-1923) dans son roman Pêcheur d’Islande (1886).
Des ex-voto et plaques des marins morts à la grande pêche ornent toujours le porche sud de la chapelle à Ploubazlanec (Côtes d’Armor). En inscrivant les noms des marins sur une plaque et en célébrant l’Office des morts, il s’agissait de donner une sépulture symbolique aux noyés et de libérer leurs âmes.
Aux plaques et ex-voto déposés dans la chapelle est venu de se substituer le mur des disparus à l’ouest du cimetière de Ploubazlanec afin de commémorer le souvenir de 120 goélettes naufragées dont 70 perdues corps et biens entre 1852 et 1935.
Plus de 2 000 marins du Goëlo périrent en mer au cours de ces campagnes morutières… Le mur long d’une centaine de mètres est orné de panneaux en bois, de croix et de couronnes de perles. Aux marins disparus en mer d’Islande ont été ajoutés les noms des marins décédés sur les bancs de Terre-Neuve et les graviers de Saint-Pierre et Miquelon.
3. L’ossuaire de Saint-Pol-de-Léon
- L’Ossuaires de chefs (têtes) à Saint-Pol-de-Léon. ©Jean-Claude Meslé
L’ossuaire de Lanrivain (Côtes d’Armor) et celui de Trégornan (Glomel) figurent parmi les derniers ossuaires bretons conservant les ossements des morts. La quasi-totalité des ossuaires ont en effet été vidés de leurs reliques au cours du XXe siècle. Il subsiste cependant quelques lieux où les ossements demeurent exposés à la vue de tous.
La « collection » la plus impressionnante de chefs se trouve à Saint-Pol-de-Léon (Finistère). Ces reliquaires se trouvent dans une chapelle latérale de la cathédrale Saint-Pol-Aurélien et ont le beau surnom d’étagères de la nuit.
Contrairement à une coutume léonarde qui réservait ce privilège aux ecclésiastiques et aux nobles, les boîtes à crânes de Saint-Pol-de-Léon contiennent les reliques de défunts de toutes conditions sociales. Jusqu’au XVIIIe siècle la coutume bretonne était d’enterrer les morts dans les églises, puis de les transférer dans l’ossuaire, après avoir prélevé la tête, qui était enfermée dans une boîte.
4. Les victimes des colonnes infernales à Saint-Hilaire de Chaléons
- Le cimetière de Saint-Hilaire de Chaléons où un monument aux victimes civiles de la Révolution est érigé. ©Jean-Claude Meslé
À Saint-Hilaire-de-Chaléons (Loire-Atlantique), les victimes des colonnes infernales furent rassemblées dans une nécropole conçue par l’abbé Voillet sur la route de Chéméré.
Il fit bâtir un gigantesque calvaire qui devint un monument aux victimes de la Révolution. Les travaux débutèrent en 1826 et furent achevés en 1858. En choisissant de transférer en 1869 le cimetière communal autour du calvaire de l’abbé Voillet, dans le pré de la Forge, la municipalité s’inscrivit dans une continuité mémorielle.
Les noms des 84 habitants de la paroisse massacrés en 1793 et 1794 par les Révolutionnaires sont gravés dans le marbre. La victime la plus âgée s’appelait Ursule Affilé âgée de 77 ans demeurant à la Bonfiserie et la plus jeune n’avait que 3 ans, elle se nommait Anne Briand demeurant au village de la Petite Davière.
5. Une nécropole pour les militaires de 1870
Le souvenir des victimes militaires de 1870 s’est estompé en Bretagne. Il existe cependant un monument qui leur fut dédié à la nécropole nationale de Sainte-Anne d’Auray (Morbihan). Les dépouilles de vingt soldats de l’Armée de Bretagne reposent dans un ossuaire surmonté d’une sculpture d’Aristide Croisy (1840-1899) représentant un mobile breton.
6. Un mémorial pour 240 000 Bretons
Le mémorial de la Grande Guerre à Sainte-Anne d’Auray est un hommage aux 240 000 soldats bretons morts pendant la Première Guerre mondiale. Le monument commémore le sacrifice des Bretons dont les noms sont gravés dans le marbre sur un mur en forme de fer à cheval, lequel ceinture une rotonde.
Huit mille noms de soldats ont été inscrits dans le marbre d’un monument qui se veut être un point d’union. Les statues de saint Michel et de saint Yves encadrent les tombes symboliques d’un fantassin et d’un marin.
7. La tombe du bandit Saint-Lénard
- Un culte est voué à saint Lenard au cimetière d’Audouillé Neuville. ©Jean-Claude Meslé
La tombe de saint Lénard à Andouillé-Neuville (Ille-et-Vilaine) est certainement l’une des plus courues de Bretagne. Elle se trouve dans le bois de Borne, au bord de la route de Rennes. Lénard, que l’Église catholique a voulu confondre avec saint Léonard était un bandit repenti dont la légende fut collectée par Pau Sébillot au XIXe siècle.
Cimetière de Saint-Lénard d’Audouillé Neuville
Un culte est voué à saint Lenard au cimetière d’Audouillé Neuville.
À l’origine, les fidèles venaient demander l’aide de saint Lénard pour être délivrés du démon et faire marcher les jeunes enfants… Désormais, le saint est devenu polyvalent. Il est aussi bien invoqué pour soulager les maux les plus divers, trouver l’âme sœur ou réussir un examen.
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