FRÉHEL (Marguerite Boulc’h : 1891-1951)
par
Symbole, avec Damia, de la chanteuse réaliste de l’Entre-Deux guerres, Fréhel eut une vie totalement misérable : violée, mal mariée, elle perdit son enfant. Alcoolique et droguée, elle fut abandonnée par Maurice Chevalier, son grand amour, qui lui préféra Mistinguett, plus utile à sa carrière.
Elle connut pourtant le succès grâce à ses chansons réalistes mélodramatiques ou enjouées (on se rappelle surtout la fameuse Java bleue). Elle tourna également au cinéma (Pépé le Moko, l’Eternel retour).
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- Acte de naissance de Frehel - Paris.
Mais la misère fut la plus forte. Ainsi en témoigne un article paru dans Ici Paris d’une danseuse qui, trente ans après, raconte sa rencontre avec Fréhel :
« Un après-midi de 1948, au métro Anvers, je suis tombée en arrêt devant une grande femme, probablement saoule, affaissée au pied d’un arbre. Un car de police s’est bientôt arrêté pour embarquer cette pocharde. Mais elle a fait face aux flics. Elle leur a hurlé : "Foutez-moi la paix, je suis Fréhel, oui Fréhel, la chanteuse." C’était bien elle, en effet, mais les agents refusaient de la reconnaître. Je suis allée les trouver. Je leur ai dit : "Vous ne pouvez pas embarquer notre grande Fréhel. "Ils ont hésité un instant et j’ai pu glisser à l’oreille de la malheureuse : "Chantez, Madame, je vous en prie, chantez." - Alors les mains sur les hanches, les jambes écartées, dessoûlée comme par enchantement, elle a entamé La Java bleue avec autant de force, autant de fougue qu’au temps où les foules l’acclamaient. - Aussitôt les badauds se sont pressés autour de leur ancienne idole, stupéfaits d’être les témoins de cet authentique miracle. Un brigadier a murmuré : "Comme c’est triste de finir ainsi !" Puis il a rappelé ses hommes et le panier à salade est reparti à vide. »
Son enterrement à Pantin fut suivie d’une foule nombreuse.
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