Lu hier soir ce passage que je souhaite faire partager :
« Mon chemin se trouva être presque le même : cimetière du Montparnasse et boulevard Raspail. Ce n’était pas le fait du hasard ; le matin, les cimetières des grandes villes, particulièrement déserts, sont des lieux propices à la méditation. Celui-ci, avec ses chapelles de pierre, ressemble à une ville des morts. Des rues à angles droits entourent le « monument du souvenir ». On rencontre bien des noms illustres : Houdon, Rude, Huysmans, Baudelaire, et je passe sous silence des étoiles de moindre grandeur.
De tels lieux renferment des signes que nous seuls savons lire, des engrammes qu’un souvenir particulier tient gravés dans notre mémoire, quelque soit l’importance de leur objet. Grâce à eux, nous savons retrouver notre chemin. Je compte au nombre de ces signes le petit oratoire de l’archéologue Quatremère de Quincy, mort presque centenaire en 1857, à l’issue d’une vie remplie par d’austères études autant que par la houle des tempêtes. Il a pris la mesure de toute son époque, des ses joies et de ses terreurs, il a connu ses palais et ses prisons, ses honneurs et ses diffamations. Cette fois encore je retrouverai sa tombe, mais non point en revanche celle d’une jeune fille, Élisa Varoquier, dont l’épitaphe m’avait plu :
Tu dors en paix, ma fille
Et ta mère a perdu le repos.
Il est angoissant que l’on ne puisse plus dire des choses si simples avec tant de simplicité. »
Ernst Jünger, Deux visites, in Rivarol et autres essais.
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