ISSY-LES-MOULINEAUX (92) : cimetière
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A l’origine le cimetière de la ville jouxtait l’église Saint-Etienne. Puis il fut déplacé à l’angle des actuelles rue Jules Guesde et d’Alembert., probablement au XVIIè s. Ce nouveau cimetière était prévu pour accueillir 300 tombes et occupait 2,4 ha.
Il fut fermé en 1882, date du transfert des dernières concessions vers le nouveau cimetière, situé sur les hauteurs de la ville. Il laissa place aux Bains Douches municipaux, puis au Centre des Impôts.
Le cimetière communal fut inauguré le 7 juin 1864, sur un terrain entouré de vignes. Il connu des agrandissements successifs en 1873, 1908 et 1936. Fermé en 1961 au profit du cimetière Intercommunal de Clamart, il ouvrit à nouveau en 1972.
Le cimetière d’Issy est bien modeste : il faut dire que malgré sa taille respectable, on peut dire que les célébrités de tous bords ne s’y sont pas données rendez-vous ! En outre, la platitude de son relief et le peu de végétation (hormis dans les allées) n’inclinent pas vers la beauté d’un site. On remarquera (et c’est souvent le cas des communes de banlieue située si proche de Paris) la dialectique nouée entre les tombes d’une part, et les immeubles assez grands environnants, raccourci saisissant entre la vie et la mort.
Aussi, ceux qui viennent dans les cimetières uniquement pour traquer de la célébrité pourront passer leur chemin. En revanche, ceux qui s’intéressent à la statuaire trouveront quelques éléments intéressants.
Curiosités
Saluons tout d’abord la démarche intelligente -mais malheureusement trop rare- de la municipalité d’avoir édité une petite brochure présentant l’histoire et les principaux points d’intérêt du cimetière.
Si Henri Duchenne n’est pas une célébrité, son épitaphe vaut le détour : Toi qui t’arrêtes ici, ci-gît Duchenne Henri / Il mania tour à tour l’humour et l’ironie / Mais pour la mise en boîte la meilleure de sa vie /Ce fut, quand dans du chêne, on mit Duchenne Henri !
Le cimetière contient plusieurs monuments aux morts : celui de la Première Guerre mondiale , élevé par souscription publique, fut inauguré en 1924. L’édicule architectural en marbre blanc sert de de cadre à une scène de déploration : une veuve agenouillée auprès d’un soldat mort. Ce monument est de Fernand Dubois.
Au centre d’un carrefour, une statue intitulée La Veuve pour des raisons évidentes date de 1907. C’est une oeuvre de jeunesse de Pierre Albert-Birot.
Le tombeau Obry-Jassède fut érigé en 1895 sur les plans d’Hector Guimard.
Le beau tombeau du secrétaire général de la mairie Jules Beis (mort en 1897) fut réalisé par Emile Delaire. Il est orné d’un buste en bronze par Octave Paigné.
La stèle en bronze de la famille Courbot-Heim est ornée d’une magnifique alsacienne en prière sur une tombe.
La tombe de Louis Guilloteaux (mort en 1858), maire d’Issy de 1848 à 1856, est ornée d’un buste de son épouse.
Plusieurs tombes de particuliers sont ornées de médaillons ou de bustes en bronze :
- Mardiros Karagossian
Celui-ci est signé de Pierre Traverse (1924).
Signé A.H. Torcheux.
Le phénomène est connu grâce à son médiatique maire, André Santini : dans les années 1920, suite au génocide arménien, la communauté arménienne s’établit dans les hauteurs d’Issy, au point de faire de cette ville des Hauts-de-Seine un centre de la culture arménienne française (au même titre que les Georgiens à Leuville où les Russes à Nice...). Aussi, tout naturellement, la présence de cette communauté apparaît dans le cimetière, décelable par l’onomastique (étude des patronymes), l’utilisation des caractères arméniens et par l’iconographie (utilisation de la croix arménienne).
Célébrités : les incontournables...
Personne
Le cimetière abrite la tombe de la famille (dont les parents) de l’industriel et homme politique d’extrême droite Pierre Taittinger. Si celui-ci repose avec sa dernière épouse au cimetière nord de Reims, ce tombeau mentionne sa mémoire.
... mais aussi
Le journaliste sportif Jean-Paul BROUCHON (1938-2011), qui couvrit 44 éditions du Tour de France (dont 31 à moto), principalement pour la radio (France Inter, puis France Info, dont il devint rédacteur en chef en 1992). Il fut à l’origine du Multiplex, émission consacrée au football.
Le peintre paysagiste, mais également graveur, Georges-Marcel BURGUN (1874-1964), formé un temps à l’École des Arts décoratifs, puis auprès du peintre Émile Jacque. Issy fut sa principale source d’inspiration, et il appliqua donc sa palette fauviste dans des compositions de paysages urbains.
Le coureur cycliste Bruno CARINI (1912-1945), qui fut fauché par une voiture alors qu’il participait à une course en Provence.
Paul CRUET (1880-1966) : mouleur de Rodin entre 1908 et 1917, il avait son atelier à Issy.
Auguste GERVAIS (1857-1917) : journaliste français, il collabora au National, où il publia régulièrement de 1883 à 1887, puis au Petit Journal, au Matin, au Soir, et pour finir à L’Aurore. Clemenceau appréciait sa plume. Il publia également plusieurs ouvrages sur l’armée et la colonisation en Asie. Elu maire d’Issy, il fut député de la Seine de 1898 à 1909, puis sénateur de ce même département de 1909 à 1917. Il s’y occupa essentiellement des affaires militaires et coloniales. Il mourut d’un accident d’automobile. Sa tombe, aux inscriptions désormais très effacées, est ornée d’un médaillon en bronze par Demirel.
Le général de corps d’armée et pilote d’essai Roland GLAVANY (1922-2017), qui en 1958 fut le premier pilote à faire franchir Mach 2 à un appareil européen. Il était le père du ministre Jean Glavany.
Aristide JOBERT (1869-1942) : socialiste français, il fut député de l’Yonne de 1914 à 1919.
Yves MAHÉ (1919-1962) : pilote de chasse, il s’engagea dans les
FFL. Avec son unité, il participa en qualité de chef de patrouille aux opérations de défense du territoire notamment la nuit mais également à des missions de protection de convois maritimes et de mitraillage des positions côtières ennemies. Volontaire pour le groupe de chasse Normandie-Niémen dès sa création, il fut envoyé sur le front de l’Est pour combattre auprès des Soviétiques.
Fait prisonnier à plusieurs reprises par les Allemands, il fut un recordman de l’évasion. En 1949, il servit en Extrême-Orient. Il décéda en service commandé au cours d’une mission aérienne. Il était Compagnon de la Libération. Une plaque lui rend aussi hommage sur le caveau familial du cimetière de Guérande (44).
Albert MIRLESSE (1912-1999) : officier de réserve de l’armée de l’air française, spécialiste des simulateurs de vol, il se distingua lors de la Seconde guerre mondiale, après être parvenu à gagner Londres (1940), en passant par Bordeaux, Douala (Cameroun) et Dakar (Sénégal). Devenu capitaine dans les Forces aériennes de la France libre (FAFL), il dirigea le service de renseignements sous les ordres de Martial Valin, avant de participer en Russie, aux négociations qui débouchèrent sur la formation de l’escadrille franco-russe Normandie-Niemen, qui combattit les Allemands sur le front Est (1943-1945).
Le sculpteur Pierre-Louis ROUILLARD (1820-1881), qui produisit de très nombreuses sculptures animalières. Contrairement aux autres sculpteurs de cette spécialité, il ne réalisa que très peu de petits bronzes, privilégiant les œuvres monumentales travaillées en pierre, bronze ou fonte de fer. Il fut professeur de sculpture et d’anatomie à l’École de dessin et de mathématiques de 1840 à 1881, où il eut notamment comme élève le sculpteur animalier François Pompon. Il réalisa des sculptures, généralement animalières, pour de nombreux châteaux et les grands décors parisiens du XIXe, comme l’Opéra de Paris, le palais du Louvre, la fontaine Saint-Michel ou le tribunal de commerce de Paris.
Le colonel Alexis SANTINI (1914-1997), qui fut le précurseur de l’utilisation opérationnelle des hélicoptères dans l’armée. Il servit dans la Résistance (dans la Drôme) puis en Indochine. Il était l’époux de Valérie André, première femme militaire à atteindre le grade d’officier général, et l’une des huit femmes grand-croix de la Légion d’honneur, qui vit toujours. Leur neveu est le politicien André Santini, maire d’Issy.
Le journaliste sportif Jean NOUVEAU (Yervante Takvoroff : 1919-1998).
Merci à Nicolas Badin pour les compléments de photos.
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