LUXEMBOURG : cimetière Notre-Dame

visité en avril 2023
dimanche 4 juin 2023
par  Philippe Landru

La ville de Luxembourg possède 13 cimetières : celui de Notre-Dame, considéré comme le Panthéon Luxembourgeois, en est le plus grand et fut aménagé en 1755. Il se situait alors en dehors des enceintes de l’époque, sur le Limpertsberg.

De caractère germanique, le lieu est parfaitement ordonnancé : pas une herbe qui dépasse, pas de graviers sur les allées taillées au cordeau, une végétation présente mais toujours domptée... Mon caractère également latin aimerait y voir un peu plus d’exubérance...

Sur les tombes notables, un QR code permet de trouver sur le net des informations biographiques et historiques sur le défunt et/ou sa famille.

Une petite vidéo permet d’en cerner l’esthétique (même si la musique de piano-bar dépressif de fin de soirée n’est pas vraiment adaptée).


Curiosités


- Conservation charmante aux allures d’hôtel montagnard !

- Au centre du cimetière, un bâtiment sert aux cérémonies.
- Le monument en honneur du soldat français et du légionnaire inconnu, inauguré en 1924. Il fut conçu par les architectes Joseph Nouveau et Léon Muller, tous les deux anciens élèves de Victor Laloux. Le contexte qui explique l’érection du mausolée fut celui de réunir aux alliés belge et français, les Luxembourgeois pour constituer un front uni face à celui que représentait l’Allemagne vaincue.

- le « Hinzerter Kräiz » (ou Monument national de la Résistance et de la Déportation) est une croix confectionnée d’anciennes poutres du SS-Sonderlager Hinzert (Hunsrück) par un ancien prisonnier politique de ce camp. En 1946, le gouvernement avait put faire rapatrier sur le sol luxembourgeois les dépouilles mortelles exhumées de 78 résistants luxembourgeois assassinés au camp de Hinzert, exécutés à la prison de Köln-Klingelpütz, morts sous les bombardements à Wiesbaden ou fusillés à la prison de Francfort-Preungesheim : ils furent inhumés en ce lieu qui se dota en 1960 d’un parvis. Lors des travaux d’agrandissement et de réaménagement du site, une statue en bronze dite « Le prisonnier politique » fut érigée, œuvre de Lucien Wercollier, lui-même résistant et ancien prisonnier politique de Hinzert. Ce monument symbolise les souffrances endurées par ceux qui se sont opposés à la politique de l’occupant nazi de 1940 à 1945. C’est l’endroit où se rassemblent les survivants mais aussi les responsables politiques lors des commémorations.

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La tombe du docteur Wester est un chef d’œuvre de l’Art Déco à Luxembourg. Les vitraux aux décors floraux ont été réalisés par l’artiste Sylvère Linster, peintre verrier formé à Luxembourg et Paris. Devant sa chapelle, la tombe du conseiller à la Cour supérieure de Justice Charles SCHMITZ (1855-1907).

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Ernest Derulle (1851-1912), « agent consulaire américain », était le représentant au Luxembourg de la Red Star Line, une société anonyme belgo-américaine avec siège à Anvers, qui, entre 1873 et 1935, permit à quelque trois millions de ressortissants européens (touristes et émigrants) de quitter leur patrie pour se rendre aux États-Unis et au Canada. Son monument, œuvre de Jean Mich, est est ostentatoirement orné d’un bateau.
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Ce groupement de monuments funéraires protégés par un enclos en fer forgé est unique au cimetière Notre-Dame. Il réunit des générations de marchands qui ont marqué le commerce de la ville de Luxembourg : les familles Bruck, Schmit, Clesse et Cordonnier-Polomé. Les monuments sont sculptés en grès rose et comptent parmi les plus anciens.
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Tombeau d’ecclésiastiques


- L’ornementation funéraire, d’inspiration quasiment uniquement religieuse, est fréquente dans ce cimetière.


Célébrités : les incontournables...


Aucune célébrité à caractère clairement international ne repose dans ce cimetière. La seule qui se trouve à Luxembourg est le général George S. Patton, mais il repose auprès de ses hommes au cimetière américain de Luxembourg. Si vous voulez vous y rendre sans voiture, armez-vous de courage : il est situé en grande périphérie de la ville et n’est relié par aucun transport en commun (sinon un bus qui vous arrête à deux kms du site) !


... mais aussi


Force est de constater que la notion de « célébrité » a la plupart du temps un caractère national : passée la frontière, on perd ses repères. Aussi, la quasi totalité des personnalités présentées ici sont totalement inconnues en France. Elles constituent un patrimoine luxembourgeois dont j’indique néanmoins la présence, accompagnée de biographies très succinctes.

- Le pédagogue Mathias ADAM (1850-1936).

- Le prêtre et historien Martin BLOOM (1845-1924).

- Le ministre Victor BODSON (1902-1984), unique Juste luxembourgeois à avoir reçu cette reconnaissance pour avoir sauvé la vie d’une centaine de juifs.

- Le rosiériste Melchior BOURG (1861-1939).

- Le géomètre et député François-Charles COLLIN (1790-1851).

- Le député Gaston DIDERICH (1884-1946).

- Le chanteur, acteur et réalisateur August DONNEN (1885-1956).

- Le peintre et dessinateur Michel ENGELS (1851-1901) et son fils, l’architecte Victor ENGELS (1892-1962).

- L’architecte Jean-François EYDT (1808-1884), en compagnie de son gendre, l’architecte Pierre FUNCK (1846-1932), et du fils de ce dernier, l’architecte Paul FUNCK (1875-1939).

- Le ministre d’Etat Paul EYSCHEN (1841-1915).

- L’ecclésiastique Jean-Baptiste FALLIZE (1844-1933) qui fut député au Luxembourg, puis évangélisateur catholique en Norvège dont il devint le premier évêque. Il se fit également connaître par ses nombreux écrits, violemment anti libéraux, anti-franc-maçons et antisémites.

- Jean-Baptiste GELLÉ (1777-1847), qui fut le principal artisan de la constitution luxembourgeoise, et qui fut député de 1845 à sa mort.

- L’écrivain Willy GOERGEN (1867-1942).

- Le philosophe naturalisé français Bernard GROETHUYSEN (1880-1946), ami de Gide et de Malraux, qui fit connaître en France Hölderlin, Kafka et la sociologie allemande. Il repose avec sa compagne, la femme de lettres Alix GUILLAIN (1876-1951), dont on ramena en 1981 les cendres de Paris (elle avait été crématisée au Père Lachaise).

- Le pédagogue Nicolas HEMMEN (1855-1924) qui fut l’un des pionniers de l’enseignement aux sourds-muets

- Gustave « Gus » JACQUEMART (1882-1950), sportif et député.

- Les architectes Pierre (1841-1895) et Alphonse (1872-1950) KEMP, à la tombe ornée d’une croix celtique, auteurs de nombreuses réalisations dans le Duché.

- Le rosiériste Evrard KETTEN (1842-1912).

- Le compositeur Auguste KLEIN (1866-1945).

- Le poète romantique Ernst KOCH (1808-1858).

- L’ingénieur Guillaume KROLL (1889-1973), inventeur du titane selon un procédé qui porte son nom.

- Le dessinateur Eugène KURTH (1868-1960).

- Théodore de LA FONTAINE (1787-1871), gouverneur du Grand Duché de 1841 à 1848 puis premier Premier ministre du Luxembourg en 1848.

- Le député et botaniste Léon de LA FONTAINE (1819-1892).

- Le député et président de la Chambre Auguste LAVAL (1843-1915).

- Le « poète national » Michel LENTZ (1820-1893), auteur du poème Ons Heemecht qui, mis en musique par Jean Antoine Zinnen, devint l’hymne national du Luxembourg.

- Le biologiste et explorateur Edouard LUJA (1875-1953).

- L’abbé Jean-Pierre MAEYSZ (1780-1866).

- Le juriste Nicolas MAJERUS (1892-1964).

- L’enseignant Nicolas MARTHA (1820-1898).

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Son médaillon est l’œuvre du sculpteur messin Charles Pêtre.

- Le compositeur belge Fernand MERTENS (1872-1957).

- La famille d’industriels METZ qui joua un rôle important dans la politique et l’industrie du Grand Duché milieu du XIXe siècle au début du XXe siècle, dont les frères Charles (1799-1853), Norbert (1811-1885) et Auguste (1812-1854), qui furent tous les trois députés et reposent dans la tombe de famille.

- L’acteur de théâtre et animateur de radio Léon MOULIN (1897-1974).

- Le chef d’orchestre et compositeur autrichien Edmond PATZKÉ (1844-1903).

- Le conseiller d’Etat Ferdinand PESCATORE (1791-1862).

- Le biologiste Léopold REICHLING (1921-2009).

- L’écrivain Michel RODANGE (1827-1876).

- L’ingénieur Eugène RUPPERT (1864-1950), qui fut l’un des premiers occidentaux à implanter des fonderies modernes en Chine.

- Le président de la Chambre des députés Paul de SCHERFF (1820-1894).

- Le député Adolphe SCHMIT (1845-1927).

- Le ministre Etienne SCHMIT (1886-1937).

- L’homme de lettres Nicolas STEFFEN-PIERRET (1830-1899), pionnier du roman en langue luxembourgeoise.

- Le politicien Gaston THORN (1928-2007), qui fut Premier ministre du Luxembourg de 1974 à 1979, président de la Commission européenne entre 1981 et 1985, ainsi que président de l’Assemblée générale des Nations unies en 1975.

- L’imposteur allemand Wilhelm VOIGT (1849-1922), célèbre en Allemagne sous le nom de « capitaine de Köpenick ». Cordonnier en Prusse-Orientale et condamné plusieurs fois pour différents délits de vols et d’escroquerie, il se fit connaître par une imposture rocambolesque en 1906 : il se fit passer pour un capitaine prussien en se procurant un uniforme d’occasion, enrôla un groupe de soldats et occupa spectaculairement l’hôtel de ville de Köpenick, à l’époque un faubourg de Berlin : il arrêta le maire et se fit remettre les fonds de la ville, soit 4 000 marks. Il commanda aux soldats de surveiller les lieux pendant une heure et sortit avec l’argent puis reprit ses vêtements civils avant de disparaître. Arrêté quelques jours après, il fut condamné à quatre ans de prison. L’opinion publique lui était favorable et l’empereur l’amnistia en 1908 alors que la presse étrangère se gaussait du formatage militariste allemand que révélait l’affaire : on lui avait remis l’argent demandé à la seule vue de son uniforme. Devenu célèbre comme étant « le capitaine de Köpenick », il participa à des spectacles où il joua son personnage et écrivit même le récit de son aventure. En 1910, il se fixa au Luxembourg et reprit son métier de cordonnier. Inhumé à l’origine dans une tombe simple et provisoire de ce cimetière, la Ville de Luxembourg, consciente du caractère populaire de la personnalité, organisa un concours pour la réalisation d’un nouveau monument. L’artiste Jean-Pierre Georg réalisa le monument joignant l’inscription « Hauptmann von Köpenick » à la représentation d’un casque prussien. Des pièces de monnaie sont déposées sur sa tombe, et leur actuelle présence témoigne de la pérennité de la coutume.

- L’écrivain Batty WEBER (1860-1940).

- L’économiste, juriste et historien Paul WEBER (1898-1976).

- L’écrivain Nik WELTER (1871-1951), qui fit partie du mouvement félibrige.

- Le sculpteur Lucien WERCOLLIER (1908-2002).

- Pierre WERNER (1913-2002), qui fut Premier ministre du Luxembourg de 1959 à 1974 puis de 1979 à 1984. En 1970, il élabora un plan (appelé Plan Werner ), première tentative de création d’une union monétaire européenne. En raison des difficultés économiques en Europe à partir du milieu des années 1970, celle-ci fut abandonnée et n’a repris qu’en 1985 avec le plan Delors. En ce sens, il fut un pionnier de la création de l’ Union économique européenne et plus tard de l’introduction de l’ euro.

- Le capitaine Guillaume WEYDERT (1836-1903), qui fut l’auteur de la maquette de la forteresse de Luxembourg qui fut ensuite coulé en bronze et qui montre à quoi ressemblaient les fortifications lorsque la forteresse de Luxembourg passa sous le contrôle du traité de Londres en 1867.

- Le constructeur de ponts Jean WORRÉ (1816-1901).

- Le député et banquier Léon WÜRTH (1828-1897).

- Le compositeur de l’hymne national luxembourgeois Jean Antoine ZINNEN (1827-1899), dont l’épitaphe reproduit les premières notes.



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