PIN (le) (14) : cimetière
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Au cimetière du Pin nous attend un emplacement vide : c’est ici qu’avait été inhumée Violette MORRIS (1893-1944).
Athlète accomplie (elle fut spécialiste du lancer du poids, également sélectionnée au disque, et licenciée du Fémina Sports de Paris de 1917 à 1919, puis de l’Olympique de Paris de 1920 à 1926 ; footballeuse ; sélectionnée en équipe de France féminine de water polo, boxeuse ne craignant pas d’affronter les hommes ; coureur cycliste ; motocycliste ; pilote d’automobile ; aviatrice…), elle connut, tous sports confondus, une carrière qui s’étala de 1912 à 1935, ses plus brillantes années sportives étant celles entre 1921 et 1924. Lors des débuts de sa préparation physique en vue des Jeux olympiques d’été de 1928, les premiers où furent programmées des épreuves ouvertes aux femmes, son renouvellement de licence lui fut refusé par la Fédération française sportive féminine en 1927, pour cause d’atteinte aux bonnes mœurs. Bisexuelle, consommant deux ou trois paquets de cigarettes américaines par jour, le plus souvent engoncée dans un complet gilet-veston d’homme et pourvue d’un vocabulaire de charretier, il est clair que le personnage cadrait mal avec le conformisme de l’époque. Elle porta plainte mais fut déboutée.
À la suite du procès, Violette Morris se plaignit que « ce pays de petites gens n’est pas digne de ses aînés, pas digne de survivre. Un jour, sa décadence l’amènera au rang d’esclave, mais moi, si je suis toujours là, je ne ferai pas partie des esclaves ».
Lors des Jeux olympiques de Berlin en 1936 auxquels elle assista en tant qu’invitée d’honneur, elle fut approchée par des recruteurs allemands et à partir de 1937, elle se livra à des activités d’espionnage pour le compte de l’Allemagne nazie. En 1940, Helmut Knochen, chef du service de renseignements de la SS à Paris, la recruta. Elle fut chargée de recruter des espions, de contrer les réseaux anglais et d’infiltrer les réseaux de résistance du Grand ouest. Elle passa ensuite, par le biais d’Henri Lafont, à la Gestapo française, rue Lauriston, où elle se livra à des activités de tortionnaire, notamment sur des femmes résistantes. Elle fut responsable de secteurs dans les organigrammes de la Gestapo de la rue des Saussaies à Paris de 1942 à 1944.
Le 26 avril 1944, elle fut assassinée par des maquisards du groupe normand Surcouf alors qu’elle se trouvait sur une route de campagne au volant de sa Traction Avant Citroën. Son corps criblé de balles, comme ceux des cinq autres occupants de la voiture dont deux jeunes enfants, fut inhumé en septembre 1945 dans le cimetière du Pin.
- Registre des inhumations
Ses restes furent ultérieurement récupérés (comme l’atteste son nom rayé dans le registre des inhumations) et mis à l’ossuaire communal.
- L’ossuaire
Dans ce cimetière repose également l’archéologue Raymond LANTIER (1886-1980), qui fouilla et étudia le cimetière wisigothique d’Estagel (Pyrénées-Orientales) et participa aux fouilles de Carthage. Conservateur en chef, de 1933 à 1956, du Musée des Antiquités nationales à Saint-Germain-en-Laye, professeur d’antiquités nationales et préhistoriques à l’École du Louvre, il fut membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres de 1946 à sa mort.
Merci à Nicolas Badin pour les photos.
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