SARE (64) : église Saint-Martin et cimetières
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8 km de l’Atlantique à vol d’oiseau, bordant la frontière espagnole de la Navarre, Sare, qui bénéficie du label des Plus Beaux Villages de France, offre une histoire et un patrimoine très riches regardant à la fois vers l’Océan et l’Espagne, mais avant tout inscrits dans l’identité basque, dont ce village semble présenter l’essence.
L’église Saint-Martin et l’ancien cimetière
L’église de Sare est une des plus belles églises du Labourd. Fortifiée, elle fut agrandie au début du XVIIème siècle sous la cure de Pedro de AXULAR (1556-1644), célèbre écrivain auteur de Gero (Après), chef-d’oeuvre littéraire grâce auquel il a « élevé la vieille langue basque au niveau des autres ». Sa sépulture se trouve à l’intérieur de l’église, ainsi qu’une plaque apposée par le Prince Louis Lucien Bonaparte, bascophile.
Le chœur abrite cinq autels à retables et trois étages de galeries pour pouvoir contenir les fidèles lors de la messe, attestant de la vague de conversions au christianisme du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle.
Une plaque — Orai den seroraren eta izanen direnen jar lekua eta hobia - « Ceci est le siège et le caveau de la benoîte actuelle et de celles à venir » — signale la tombe et la place traditionnelle des benoîtes au Pays Basque : ces dernières étaient ls gardiennes de l’église, chargées du nettoyage du sanctuaire, et de l’entretien des linges sacrés et des autels ainsi que des ornements sacerdotaux. Elles sonnaient également les cloches pour les offices, mais également pour éloigner les orages et la grêle. Jusqu’en 1804, les corps étaient inhumés dans l’église où l’on trouve des dalles avec l’inscription « Jarlekua » (emplacement du siège) précédée du nom de la maison.
Une autre plaque sur l’église mentionne l’exécution, en 1794, de la « martyre » Madeleine Larralde : son histoire est confuse et fut très instrumentalisée. Elle n’était pas si jeune qu’on l’a dit, et les raisons de sa condamnation sont peu claire (morte pour sa foi où trouvée sur le territoire espagnol, alors en guerre contre la France ?).
Le clocher fut surélevé en 1765. Il porte, à côté de son l’horloge, l’inscription : « Oren guziek dute gizona kolpatzen azkenekoak du hobirat egartzen » qui signifie « Toutes les heures blessent l’homme, la dernière l’envoie au tombeau ».
Contre l’église se trouve le monument aux morts de 1914-18, œuvre de Maxime Réal del Sarte.
A côté de l’église, se trouve l’ancien cimetière.
Y repose le poète bertsulari (« versificateur » en basque ; c’est un chanteur de vers rimés et strophés en langue basque appelé bertso, improvisés devant un public) Jean-Baptiste ELIZANBURU (Joan Batista Elizanburu Irazabal : 1828-1891), qui après avoir fait le séminaire, puis être devenu officier dans l’armée, se fit remarquer en 1855 avec un 1er prix décerné lors des jeux floraux d’Urrugne. En 1859, il composa son œuvre la plus célèbre Nere Etchea (« Ma maison »), qui célèbre une existence paisible et heureuse dans une propriété basque.
On y trouve également la tombe de Victor ITURRIA (1914-1944). Fils d’agriculteurs, champion régional de pelote basque, il s’engagea dans la France libre : sa maîtrise de la pelote le rendit redoutable dans l’exercice du lancer de grenade ! Il fut envoyé au Moyen-Orient, puis en Libye où il participa à l’attaque d’un des aérodromes de Benghazi. Ce furent ensuite les campagnes d’Egypte, de Tunisie, puis la Bretagne où il prit part à l’attaque de Lorient puis le 15 août, à celle de Quiberon. Dirigé sur Nantes, il effectua des patrouilles le long de la Loire. il fut tué par une rafale de mitrailleuse lors d’une embuscade près de Blain en Loire-Atlantique. Il fut fait Compagnon de la Libération.
Y repose enfin PATXOLA (Jean Baptiste Yruretagoyena : 1883-1956), tailleur de pierre qui remit au goût du jour, dès 1930, la tradition de la croix discoïdale.
Le nouveau cimetière
Cette tradition basque de la stèle discoïdale est présente dans tous les cimetières de la région, mais elle occupe une place particulièrement centrale dans le nouveau cimetière de Sare, situé en périphérie du village. Au Pays basque, elle s’appelle hilarri, de hil « mort » et arri « pierre ». Les règles de réalisation suivent un rite précis : seule la pierre tombale porte une inscription, la discoïdale est gravée de symboles sur une ou deux faces. Elle est composée d’un disque de pierre circulaire qui surmonte un socle de forme trapézoïdale. Le disque est orné d’une croix basque (lauburu en basque, qui signifie « à quatre têtes »), de figures géométriques (symboles solaires par exemple) ou symboles chrétiens.
Dans les cimetières contemporains, évidemment, les stèles sont plus simples et usinées en série.
Derrière la petite nécropole moderne, une allée pavée se signale également par une clôture en lauzes, autre tradition locale.
C’est dans ce nouveau cimetière que depuis 2013 que l’on trouve, au centre du columbarium, un ensemble mégalithique de type dolmen.
Les cimetières du pays Basque sont à l’évidence des lieux en France où s’inscrit le plus les particularismes de l’identité régionale.
Source et photo tombe Elizanburu : sare.blogs.sudouest.fr
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