PAUL Sylvie (1913-1983)
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En septembre 1951, le commissariat du XVe arrondissement reçoit une lettre anonyme annonçant l’assassinat d’une certaine Jeanne Perron, tenancière d’un hôtel miteux, où logent des immigrés. Sur place, la police fait connaissance avec Sylvie Paul, qui se présente comme sa remplaçante depuis trois mois. Affaire étrange : le mari de Jeanne Perron ne s’est pas inquiété de sa disparition et semble vivre avec Sylvie Paul, dont on découvre qu’elle a passé pas mal de temps en maison de correction.
- La découverte du cadavre dans le sordide Hôtel du Théâtre
Très rapidement, les soupçons se portent sur elle, qui disparait entre-temps. Lors de la perquisition de l’hôtel, on découvre derrière un mur récent de la cave le cadavre de Jeanne Perron, morte asphyxiée. L’enquête démontre que Sylvie Paul avait des problèmes d’argent récurrents, et qu’elle est partie en Algérie où on la retrouve.
Arrêtée, elle nie le crime et accuse un ancien amant algérien. La presse se passionne pour l’affaire : Détective la surnomme green eyes, en raison de ses magnifiques yeux émeraudes. L’enquête avance et met en lumière la mythomanie de la suspecte qui finit par avouer le crime sur un coup de sang. Simone Cornec et René Floriot deviennent ses avocats. Son passé est mis à jour : délinquante dans sa jeunesse, emprisonnée dès 17 ans durant de longues années, arrêté par les Allemands durant l’Occupation pour avoir volé le portefeuille d’un officier, elle fut déportée à Ravensbrück puis à Bergen Belsen. Se monte alors un passé mêlant faits réels et mythomanie : elle aurait volé les plans du mur de l’Atlantique, aurait permis l’évasion de résistants, aidé les malades du typhus à Bergen Belsen...
Ses avocats dressent un portrait mythifié de la prévenue, qui bénéficie de témoignages de résistants, dont celui de Geneviève Anthonioz-De Gaulle, qui croisèrent sa route à un moment. Peu de temps après la Libération, condamner lourdement une "résistante" serait mal vu : elle est finalement condamnée à 10 ans de prisons. Elle passa presque tout son temps seule en cellule, car, de l’avis pénitentiaire, elle était franchement ingérable.
Il est fascinant de constater, y compris dans des sources des plus sérieuses, certaines informations grotesques la concernant : elle aurait bénéficié à son procès du témoignage d’Honoré d’Estienne-d’Orves (on voit mal comment, fusillé en 1941, il aurait pu témoigner à un procès dans les années 50 !!) ; elle aurait inspiré le personnage de Madeleine dans Fragile ou le panier d’œufs de Jean-Louis Bory (quel visionnaire ! Ce roman sortit en 1950 mais il eut connaissance d’une affaire criminelle qui commença un an plus tard !!!...).
Libérée en 1960, elle entra au couvent dans le Doubs. En 1968, elle rejoignit un amant en Allemagne. C’est finalement à Puteaux qu’elle repose, dans le nouveau cimetière. La tombe n’est pas à l’abandon et a été renouvelée en 2013.
Merci à cp pour la découverte et la photo.
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