Ce soir, le président Macron recevait le président des émirats unis au grand Trianon, à Versailles.
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Un boulevard Jules Verger coupe en deux Dinard. Un certain Jules Verger (1896-1972) repose dans le carré 9 du cimetière. Ancien combattant, il fonde au sortir de la guerre une entreprise d’installation électrique. En 1925, il compte dix employés. Il s’associe à un nommé Louis Delporte, qui a aussi dix ouvriers. En 1935, les établissements Jules Verger&Delporte totalisent 200 employés, arrive le Front Populaire, et Jules Verger n’aime pas ça ! Son paternalisme impénitent l’entraîne à prendre les choses en mains. Il se propulse à la tête des instances corporatistes de sa profession, et l’avènement du maréchal Pétain est pour lui une divine surprise ! A l’instar d’un Schueller, il intrigue à tel point qu’il aura sa francisque ! Delporte aussi.
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Il passe sans ennuis la période de l’épuration, développe son entreprise, et elle comptera 2000 personnes au milieu des années soixante. Avec une bonne réputation, et des agences dans les confettis de l’Empire en voie de décolonisation.
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L’apothéose du rugueux jadis pétainiste Verger sera due… Au général de Gaulle ! C’est lui qui décide que la France désormais recevra en grand tralala les chefs d’Etat étrangers à Versailles. Au Trianon. Et Verger&Delporte remporte le chantier de l’électrification et de la téléphonie du prestigieux bâtiment. Avec d’invraisemblables dispositifs comme une table escamotable qui disparaît à l’étage du dessous pour que le personnel puisse la garnir sans entendre les conversations des grands de ce monde
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Peine perdue, Pompidou puis Giscard estimeront que Versailles est trop loin de Paris, que ça créée du bazar ; Macron sait, lui, que Versailles ça en impose. Il y a même reçu Poutine. Versailles impressionne aussi les américains, il suffit de voir les monumentales sépultures du cimetière des Gonards.
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J’ai jadis travaillé quatre étés chez V&D, aussi moult anciens m’ont narré les aspects hors normes des chantiers « versaillais », comme le passage épique de la machinerie du théâtre Montansier en 220 volts ! Avec rebobinage de tous les moteurs, un par un…
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Jules Verger avait un château vers la vallée de Chevreuse. Avec un poste haute tension pour l’alimenter. Il faut régulièrement « entretenir » ce genre d’installation. EDF doit couper l’alimentation le temps du passage du plumeau. Mon père qui travaillait à EDF a parfois été celui qui désignait un agent pour l’opération. Il n’était pas rare que le vieux Verger soit là, et pour peu qu’il ait senti chez l’agent le même feu sacré qu’en lui brûlait encore pour le métier, il lui filait un petit billet pour le remercier de lui avoir rappeler le bon vieux temps ! Un ancien pétainiste donnant un pourboire à un possible cégétiste… Tout ça, ça fait d’excellents français !
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