ELKABBACH Jean-Pierre (Jean-Pierre El Kabbach : 1937-2023)
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Ceux qui ne sont plus jeunes ont le souvenir d’émissions de télévision des années 1970, menées tambour battant par Jean-Pierre Elkabbach avec son complice – plus placide – Alain Duhamel. Les débats étaient particulièrement corrosifs avec Georges Marchais, alors secrétaire général du Parti communiste français, qui reprochait constamment à Elkabbach de lui couper la parole. L’humoriste Thierry Le Luron résuma la chose en un « Taisez-vous Elkabbach ! », formule devenue célèbre, au point d’être prise pour titre du livre écrit par Jean-Pierre Elkabbach et son épouse. On a aussi en tête sa mine déconfite – à l’image de celle d’Étienne Mougeotte, son ennemi de toujours, alors directeur de l’information d’Europe 1 – sur le plateau d’Antenne 2 au soir du 10 mai 1981, à 20 heures, lorsqu’il doit annoncer l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République – féroce soutien du président Giscard d’Estaing, il savait dès lors que ses jours à la télé, alors uniquement publique, étaient comptés.
Né dans une famille juive d’Oran, il devint correspondant pour Paris Inter (devenue France Inter en 1963), qu’il rejoignit en 1961. Pour avoir fait grève en Mai 68, il fut mis au placard mais devint présentateur du journal télévisé de la première chaîne de l’ORTF en 1970. Deux ans plus tard, il rejoint la deuxième chaîne pour occuper la même fonction. À la suite de l’éclatement de l’ORTF, fin 1974, il revint à France Inter, puis retourna à la télévision pour devenir directeur de l’information d’Antenne 2. Après son éviction de la télévision en 1981, il fut embauché par Jean-Luc Lagardère à Europe 1, où il occupa quasiment toutes les fonctions durant une trentaine d’années (intervieweur matinal, présentateur, directeur d’antenne, de l’info, patron…). Il eut aussi son émission sur La Cinq (1991-1992) à la suite de son rachat par Lagardère. Après l’arrêt de la chaîne, il rebondit sur France 3. En décembre 1993, en pleine période de cohabitation entre François Mitterrand et Édouard Balladur, il fut nommé pdg de France Télévisions par le CSA, succédant à Hervé Bourges. Il fut PDG d’Europe 1 en 2005, puis rejoignit CNews.
Pendant des décennies, Jean-Pierre Elkabbach il incarna pour ses détracteurs, l’archétype d’un journalisme jugé trop complaisant avec les pouvoirs, pour les autres une figure dominante et multicarte des médias français.
D’abord inhumé dans un caveau provisoire en bordure de la 18ème division, il repose désormais dans son caveau, au milieu de cette même division.
Source : Le Monde / Télérama
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