SAINT-MAIXENT-L’ÉCOLE (79) : ancien cimetière

visité en décembre 2022
jeudi 5 janvier 2023
par  Philippe Landru

Ironie du sort : j’ai passé douze mois d’ennui à Saint-Maixent, scientifique du contingent à l’ENSOA. Tous les jours je suis passé devant le cimetière : je m’intéressais déjà à la taphophilie à l’époque, mais de manière beaucoup plus superficielle. Je ne m’attendais pas à y trouver de notoriété particulière. Tous les jours pourtant, je me disais qu’il me fallait le visiter...Le temps passa sans que je n’y mette jamais les pieds !
26 ans plus tard j’y suis retourné, avec la ferme intention d’enfin le découvrir.

Le cimetière de Saint-Maixent-l’Ecole est fort ancien puisqu’il date du XIVe siècle ! Il se compose de deux parties « historiques », l’une consacrée aux catholiques et l’autre aux protestants. De 1881 à 1940, Saint-Maixent a accueilli une école militaire de formation d’officiers de l’armée de terre (infanterie, puis infanterie et chars). La commune est depuis 1963 le siège de l’École nationale des sous-officiers d’active, qui forme tous les sous-officiers de l’armée de terre française (la fameuse ENSOA où j’ai passé un an). Le cimetière reflète donc évidemment cette forte identité militaire de cette ville de garnison : y reposent bon nombre d’officiers et de sous-officiers.


Curiosités


- Une commune aussi marquée par la présence militaire se devait d’avoir un carré consacré aux soldats morts.

- Présence d’un imposant calvaire en fonte des fonderies Ducel.

- A l’entrée du cimetière, l’imposante chapelle rouillée de Célestin Blot (+1840), qui créa une filature à Saint-Maixent, et de ses descendants.

- Le 9 février 1895, un incendie eut lieu dans une boulangerie de la commune : les deux filles du couple de boulangers périrent carbonisés. Un monument par souscription publique fut élevé sur leur tombe.

- Le cimetière de Saint-Maixent possède, comme c’est le lot et la spécificité de la quasi totalité des cimetières de Poitou-Charentes, de tombeaux à chevalet : les dalles funéraires (ou les sarcophages, parfois en berceau inversé) sont montées à leurs deux extrémités sur deux chevalets qui les tiennent à distance de la terre.

JPEG - 37.6 ko
Une lanterne des morts tient lieu de tombeau à un curé.

- Le cimetière possède son lot de chapelles, parfois imposantes, des notabilités locales.

- Si le colonel Denfert-Rochereau repose au cimetière de Montbéliard, c’est parce que son épouse en était originaire. Lui était né à Saint-Maixent d’une famille protestante d’origine charentaise installée ici : le cimetière de la commune abrite la tombe de plusieurs membres de sa famille, dont ses parents et ses grands-parents.

- On trouve également dans ce cimetière la sépulture des parents du chirurgien Jean-Zuléma Amussat. Le cœur de ce dernier fut exhumé du Père Lachaise et apporté ici en 1857.

- Une plaque, sur la tombe de famille Lemarchand, rappelle la mémoire de Christian Lemarchand, alias frère Bruno, un des sept moines assassinés en 1996 du monastère de Tibherine, en Algérie, durant la guerre civile. Il était né à Saint-Maixent et avait été ordonné prêtre dans l’abbatiale, comme le rappelle une plaque d’un des piliers de celle-ci.

JPEG - 39 ko
Les Proust sont nombreux dans la région : saluons au passage une Madeleine !

Célébrités : les incontournables...


Aucune


... mais aussi


- Le sculpteur Eugène CAILBAULT (1854-1933), à la tombe très ornée.

- Le général Louis-Eugène FAUCHER (1874-1964), qui durant l’entre-deux-guerres dirigea la mission militaire française en Tchécoslovaquie de 1926 à 1938. Entré dans la Résistance, arrêté par la Gestapo et détenu au camp de Füssen-Plansee jusqu’à la fin de la guerre, il s’efforça par la suite de relancer l’amitié franco-tchécoslovaque, mais dut renoncer après la prise de pouvoir par le parti communiste à Prague, se consacrant désormais à l’aide aux exilés.

- Jacques FOUCHIER (1913-1994) : maire centriste de Saint-Maixent, député des Deux-Sèvres de 1958 à 1986 (où il fut un des ténors de la droite catholique, intervenant contre la Loi Veil sur l’IVG, ou contre la loi sur le divorce par consentement mutuel), il fut secrétaire d’État auprès du ministre de l’Agriculture de 1978 à 1981.

- Le notaire Pierre-Henri GOGUET (1830-1886), maire de Saint-Maixent à deux reprises entre 1870 et 1882, qui fut sénateur des Deux-Sèvres de 1882 à 1886. Ce fut sous son administration que fut organisée l’École des sous-officiers.

- Léon LAUNOY (1876-1971) : pharmacien, zoologue et naturaliste, il fonda en 1906 le premier laboratoire de contrôle physiologique des médicaments. En 1926, il créa un cours de pharmacodynamie et de toxicité à la faculté de pharmacie de Paris. Il était membre des Académies de Médecine et de Pharmacie.

- L’homme de cirque Charles SPESSARDY (Karl Spiessert : 1864-1921). Hongrois fils d’un montreur d’ours dont il dut apprendre le métier, il monta avec son frère Paul la « Ménagerie des frères Spessardy », composée d’ours et de tigres, qui se produisit dans le monde entier durant la Belle Epoque ( en particulier à la cour de Russie pour le couronnement du tsar Nicolas II). Après plusieurs tournées aux Etats-Unis, il se lança dans l’exploitation de salles de cinéma, d’abord à Pithiviers puis à Cholet. Il se fixa à Saint-Maixent où il mourut. Son fils Charles Spiessert poursuivit la vocation familiale en rachetant en 1928 le cirque Pinder qu’il dirigea jusqu’à sa mort en 1971. Il repose dans ce caveau avec son épouse Maria Adelaïde Morelli (1866-1935), fille d’un directeur de cirque anglais ; un de leurs enfants, Charles, mort à 9 mois, et Henri Louis Bonnin [1] (1874-1936). A l’origine, sa tombe comportait un buste le représentant et une statue représentant un tigre couché [2] On cherchera en vain le buste et le tigre.

JPEG - 15.4 ko
Le buste, désormais disparu.

Source pour C. Spiessert.

Source : comme pour beaucoup de cimetière du département, on consultera l’excellent site des cimetières mellois qui apporte une quantité considérable d’informations et de photos.


[1Charles fils et son frère Roger avaient tous les deux épousé des filles Bonnin.

[2Dans ses Mémoires, Jean Richard, originaire du département et qui devait bien plus tard racheter le cirque Pinder aux héritiers Spiessert, raconte que, jeune, il se rendait très souvent sur ce tombeau au cimetière de Saint-Maixent car il était fasciné par ce tigre, voyant même dans cette fascination l’une des origines de son attirance pour le cirque. Il y précise qu’un bataillon de bigots le fit enlever car le sculpteur avait doté le félin d’attributs particulièrement virils !


Commentaires

Logo de Valois
SAINT-MAIXENT-L’ÉCOLE (79) : ancien cimetière
vendredi 13 janvier 2023 à 00h02 - par  Valois

Bonjour,
Après être passé dans l’ancien cimetière de St Maixent lEcole en 2015 je crois, j’avais énuméré le fait qu’il serait intéressant que certaines tombes jugées en état d’abandon, faisant l’objet de procédures de reprises soient reconnues comme du patrimoine funéraire à protéger. Je ne cite pas à qui j’ai fais cette remarque. En tout cas je suis bien content que des actions soient mises en œuvre pour protéger ce patrimoine d’une grande richesse patrimoniale et architecturale.

Brèves

Mise à jour et conseils aux contributeurs

samedi 29 octobre 2022

Je suis en train de remettre à jour toutes les rubriques qui listent le plus exhaustivement possible le patrimoine funéraire de tous les départements. Tous les cimetières visités par moi (ou par mes contributeurs) y sont portés, mise-à-jour des couleurs qui n’étaient pas très claires dans les versions précédentes (le noir apparaissait vert), rajout de tombes depuis les visites, photos de tombes manquantes... N’hésitez pas à les consulter pour y trouver la version la plus globale du patrimoine. Ces rubriques représentent les listes les plus complètes que l’on puisse trouver sur le net du patrimoine funéraire français.

Contrairement aux articles, vous ne pouvez pas interagir sur les rubriques : aussi, si vous avez une information nouvelle à apporter sur un département, merci de laisser votre message en indiquant clairement le département et la commune concernée sur un article dédié uniquement à cela : Le patrimoine funéraire en France : classement par départements

Merci et bonne lecture.

Qui est derrière ce site ?

vendredi 14 février 2014

Pour en savoir un peu plus sur ce site et son auteur :

- Pourquoi s’intéresser aux cimetières ?
- Pourquoi un site sur les cimetières ?
- Qui est derrière ce site ?