PAIZEY-LE-TORT (79) : cimetière
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La commune a eu l’intelligence de maintenir au flanc de l’église et autour de son calvaire son vieux cimetière, dont les tombes à chevalet, pour la plupart illisibles, constitue un véritable conservatoire de l’art funéraire en Poitou.
Le cimetière nouveau, à quelques centaines de mètres, est plus classique.
Aucun tombe ne s’y signale particulièrement mais c’est ici que repose un personnage qui fit durant toute sa vie l’objet de polémiques : René HARDY (1911-1987).
Cadre à la SNCF, appartenant au groupe de résistance Combat, il était depuis avril 1943 chargé des sabotages des voies ferrées. Sous les noms de guerre de "Bardot" et "Didot", il préparait en tant que technicien de la SNCF, avec Max Heilbron, un plan de sabotage des trains dans la région Sud. Il fut arrêté par Robert Moog, agent français de l’Abwehr, le 7 juin 1943, vers minuit, dans le train Lyon-Paris. Ramené le 10 à Lyon par Klaus Barbie, chef de la Gestapo de Lyon, il fut interrogé par ce même Barbie, qui le relâcha vers 01 h du matin, le 11, sans savoir que Hardy était le "Didot" qu’il pourchassait intensément depuis des mois. Au petit matin, un télégramme donnant le signalement précis de Didot arriva au bureau de Barbie, qui permit à celui-ci de comprendre sa magistrale bourde : Hardy était Didot. Relançant la chasse à l’homme, Barbie reprit Hardy-Didot, à Lyon.
Le 21 juin, convoqués par Jean Moulin suite à l’arrestation à Paris du général Charles Delestraint, leur chef, les dirigeants de l’Armée secrète se réunirent chez le docteur Frédéric Dugoujon, à Caluire-et-Cuire, dans la banlieue de Lyon : Jean Moulin, André Lassagne, Raymond Aubrac, Henri Aubry, Bruno Larat, le colonel Schwarzfeld et le colonel Lacaze. La rencontre fut camouflée en consultations médicales. Sur ordre de Pierre de Bénouville, appuyé par Claude Bourdet et Jacques Baumel, tous de Combat, Henri Aubry, lui aussi de Combat, qui avait un temps fait fonction de chef d’état-major de l’Armée secrète, convainquit Hardy, qui ne voulait pas aller à la réunion, de s’y rendre avec lui. Il s’agissait pour eux de protester, voire de s’opposer aux dernières décisions de Jean Moulin qui venait de priver Combat, à l’origine de l’Armée secrète, de son influence prépondérante à la direction de celle-ci, et ce au profit de Libération.
La Gestapo surprit la réunion et arrêta les huit participants, ainsi que le médecin et ses patientes. Hardy, quant à lui, parvint à s’échapper. Selon certains témoins oculaires, les policiers le laissèrent s’enfuir. Selon plusieurs autres, il fut atteint par une balle allemande qui lui brisa un bras. Mais s’il échappa alors à la Gestapo, elle le reprit quelques jours plus tard et le détint dans un hôpital militaire allemand, d’où, dit-on, il s’échappa finalement en août.
Accusé de la responsabilité de cette arrestation, Hardy fut arrêté après la Libération. Faute de preuves, il fut acquitté lors de son procès, en janvier 1947, par la cour de justice de la Seine. On découvrit alors que Hardy avait menti sur le fait qu’il avait été arrêté par la Gestapo peu avant les faits. De nouveau arrêté, il fut acquitté derechef au bénéfice du doute, en 1950, cette fois par le tribunal militaire, mais de justesse : jugé coupable avec une voix de majorité, alors qu’il en fallait deux pour être condamné. À chaque fois, il fut défendu par l’avocat Maurice Garçon.
Il devint par la suite écrivain, publiant notamment Amère victoire qui le rendit célèbre, mais le doute se maintint toute sa vie sur sa possible trahison.
Sa très discrète tombe ne se signale que par sa plaque épitaphe, qui indique :
René HardyUsé par la haineEt la sottise humaine- Sa foi en Dieu- Son amour pour la France- Sa confiance dans la jeunesseLui ont permis de vivreJusqu’au 12 avril 1987
A l’entrée du cimetière, on remarquera la tombe du couple Arnault, les donateurs du cimetière.
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