LARDET Pierre-François (1872-1945) et Blanche (1880-1956)

Père-Lachaise - 95ème division
samedi 23 mai 2020
par  Philippe Landru

Une belle découverte au Père Lachaise de Nicolas Badin.

Au début du XXe siècle, Pierre-François Lardet, ex-banquier, journaliste amateur d’art lyrique et aventurier se rendit en Amérique latine. Il découvrit au Nicaragua le « chocolat » des Mayas ; farine de banane parfumée avec du cacao, de la crème d’orge et du sucre, que son épouse Blanche baptisa du nom de Banania. Il introduisit cette recette dans une Europe en mal d’exotisme et qui y vit un moyen de mieux nourrir les enfants. Les talents de publiciste de Lardet firent le reste : il saisit le nouvel enjeu commercial tout jouant de la mythologie coloniale naissante. La première boite sortie en 1912 de son usine de Courbevoie venta le gain en énergie et en force de la boisson chocolatée au point de faire du miracle un produit national.

A l’Antillaise entourée de régimes de bananes se substitue durant la Première Guerre mondiale « l’ami Y’a bon » sous les traits du populaire -et toujours exotique- tirailleur sénégalais, dessiné par le peintre de Andreis, puis plus tard par Sepo. Coup de génie : décliné en crème et en entremets, « le plus nourrissant des aliments français » est envoyé au front par wagons entiers pour faire le délice des poilus, avant de faire celui des enfants des années folles.

Après la Seconde Guerre mondiale, la perception du personnage se brouille : Senghor ne souhaitait-il pas déchirer « les rires Banania de tous les murs de France » ? En 1959, le tirailleur devint l’ami au sourire poupin de l’affichiste Hervé Morvan, pour se simplifier en 1967 au point de ressembler, en 1977, à une sorte d’écusson sur fond jaune. Tous les enfants de France ont étudié en histoire l’évolution de l’emblème de Banania, témoignage de l’évolution du regard des mentalités sur l’histoire coloniale.

Pierre-François Lardet mourut désargenté, s’étant fait déposséder de son entreprise. Il repose dans la chapelle de famille de son épouse (Fillion).


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Source : Petites histoires des marques, Jean Watin-Augouard


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