Les Carolingiens

lundi 11 février 2008
par  Philippe Landru

A l’origine de la famille des Carolingiens, on trouve les Pippinides, c’est-à-dire la descendance de Pépin de Landen, une dynastie franque d’Austrasie qui parvint à monopoliser la charge de maire du palais puis, avec Pépin le Bref, à usurper la fonction royale. Le nom de Carolingien désigne la descendance du plus fameux des Pippinides, Charlemagne.

Il est intéressant de noter que, par souci de légitimation, les Pippinides aient cherché à se faire inhumer à Saint-Denis. La basilique n’était pas encore parvenue à s’imposer comme nécropole définitive des souverains francs, mais la présence de plusieurs d’entre eux, dont celle de Dagobert, et la renommée religieuse croissante de l’abbaye, représentèrent une séduction suffisante pour la nouvelle dynastie franque. En réalité, moins encore que pour les Mérovingiens, Saint-Denis ne devint la nécropole royale : bien peu d’entre eux s’y firent inhumés et cela pour plusieurs raisons. La première est qu’une fois consolidés dans leur pouvoir, les Carolingiens retrouvèrent le réflexe des Francs : celui du tropisme oriental. De plus, et malgré les efforts de Charlemagne pour fixer une cour à Aix, les Carolingiens - des francs - restèrent essentiellement des itinérants. Les lieux d’inhumation relevaient encore beaucoup des terres de prédilection des souverains (Reims, Compiègne...). Enfin, et le détail n’est pas négligeable, le vaste empire carolingien ne survécut pas longtemps, divisé rapidement en trois parties. Notre actuelle France, héritière de la Francie occidentalis de l’époque, n’était qu’une partie - et pas la plus stratégique - de l’Empire.

Cependant, et même si elle ne fut pas nécropole unique, Saint-Denis garda un pouvoir d’attraction fort sur la monarchie. On précisera que, comme pour les Mérovingiens, le lieu d’inhumation de certains Carolingiens reste peu précis.

Pour les remarques générales, on consultera l’introduction.

Pour les liens généalogiques, on pourra se référer à cette page.

- Charles Martel (ca688-741) : maire du palais d’Austrasie, puis de Neustrie et de Bourgogne, il ne monta pas sur le trône mais sa victoire sur les musulmans en 732 l’auréola d’une gloire qui rejaillit sur les Pippinides en pleine ascension. Tout naturellement, lui qui exerçait la réalité du pouvoir se fit inhumer dans la basilique Saint-Denis. Son gisant fut commandé par Saint-Louis vers 1263. L’épitaphe de sa première épouse, Rotrude (ca695-724) fut retrouvé par Alexandre Lenoir et placée au musée des Monuments français. Elle se trouve aujourd’hui au musée de Cluny.

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Gisant de Charles Martel - St Denis.
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Epitaphe de Rotrude - musée de Cluny.

- Carloman (ca715-754) : maire du palais avec son frère Pépin, il administra l’Austrasie mais abandonna le pouvoir pour se consacrer à la vie monastique. Il fut inhumé au monastère du Mont-Cassin, en Italie.

- Pépin le Bref (714-768) : maire du palais, ce fut lui qui mit fin au simulacre qui depuis plus d’un siècle maintenait artificiellement la dynastie mérovingienne. En 751, c’est par un coup d’Etat légitimé par le pape qui a besoin du bras armé des Pippinides qu’il se fait sacrer roi des Francs. C’est donc en roi qu’il se fit inhumer dans la basilique Saint-Denis, rejoint plus tard par son épouse, Berthe, dite « aux grands pieds ». Leurs deux gisants, présents dans la basilique, furent commandés par Saint-Louis vers 1263.

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Gisant de Pépin le Bref - St Denis.
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Gisant de Berthe - St Denis.

- Carloman (751-771) : frère cadet de Charlemagne, il devint roi des Francs avec lui en 768 et reçut nombre de terres aujourd’hui sur le territoire français. Bien qu’inhumé à Reims, la basilique Saint-Denis possède son gisant, commandé par Saint-Louis vers 1263.

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Gisant de Carloman - St Denis.

- Charlemagne (747-814) : roi, puis empereur des Francs, il fut également roi des Lombards. Il imposa le vaste empire désormais appelé carolingien, et déplaça son centre de gravité vers l’est. Il eut quatre épouses et de nombreuses concubines : sa seconde épouse Hildegarde fut inhumée en l’église Saint-Arnoult de Metz (57), sa troisième épouse Falstrate en l’église Saint-Alban de Mayence (Allemagne) et sa quatrième épouse Liutgarde en l’église Saint-Martin de Tours. Il fonda Aix-la-Chapelle où il se fit inhumer. En l’an 1000, Otton III fit ouvrir le tombeau de Charlemagne ; d’après un récit de chroniqueur, dont l’exactitude est plus que douteuse, il aurait trouvé le corps de l’empereur assis sur le trône, revêtu du costume et des insignes impériaux : ce siège servit ensuite de trône aux 37 empereurs du Saint Empire. En 1165, Frédéric Barberousse fit transférer le corps dans un nouveau sarcophage en marbre blanc (représentant sur une face l’enlèvement de Proserpine) qu’il plaça sous l’autel. En 1356, la dépouille fut à nouveau transférée dans une chasse d’or et d’argent : elle fut ouverte en 1804 en présence de Napoléon et Joséphine, et celui-ci se fit remettre l’humérus droit qui fut gardé au Louvre dans un reliquaire (les Alliés reprirent l’os en 1815). La chasse fut une dernière fois ouverte sur ordre de Guillaume II en 1906.

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Chapelle d’Aix - tombeau de Charlemagne.

- Louis Ier le Pieux (778-840) : roi des Francs et empereur d’Occident. Sa première épouse Ermengarde fut inhumée à Angers tandis que sa seconde épouse, Judith, le fut en l’abbaye Saint-Martin de Tours. Lui-même fut inhumé en l’église Saint-Arnoult de Metz (57).

- Lothaire Ier (795-855) : empereur d’Occident, il exerça de fait cette autorité sur la partie occidentale de l’Empire. Néanmoins, la guerre qui l’opposa à ses deux frères Louis le Germanique et Charles le Chauve - et qu’il perdit - lui vit attribuer les territoires à l’est de la Meuse, soit la Lotharingie. C’est sous son règne, suite au partage de l’Empire, qui naquit de facto la Francie occidentale, lointaine ancêtre de la France actuelle, qui fut attribuée à son demi-frère Charles. Il fut inhumé en l’abbaye de Prüm, en Allemagne.

- Charles II le Chauve (823-877) : roi de Francie occidentale puis empereur des Francs. Ayant reçu en partage la partie occidentale de l’Empire, c’est assez naturellement qu’il fut inhumé en la basilique Saint-Denis, tout comme sa première épouse, Ermentrude, qui contrairement à lui possède un gisant à Saint-Denis commandé par Saint-Louis vers 1263. Charles II avait néanmoins été primitivement inhumé en l’abbaye bénédictine de Nantua (01), d’où il fut transféré en 884 à Saint-Denis.

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Gisant d’Ermentrude - St Denis.

- Louis II le Bègue (846-879) : roi d’Aquitaine et roi de Francie occidentale de 877 à sa mort. Son règne voit l’émergence de la famille des Robertiens tandis que la dynastie carolingienne est en décadence. Inhumé en l’abbaye Saint-Corneille de Compiègne.

- Louis III (863-882) : roi de Francie occidentale de 879 à sa mort. Inhumé en la basilique Saint-Denis. Son gisant fut une commande de Saint-Louis vers 1263.

- Carloman (ca866-884) : proclamé roi avec son frère Louis III, il reçut la Bourgogne et l’Aquitaine puis gouverna la totalité à la mort de son frère et jusqu’à son propre décès. Inhumé en la basilique Saint-Denis. Son gisant fut une commande de Saint-Louis vers 1263.

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Gisant de Carloman - St Denis.

- Charles III le Gros (839-888) : Roi de Francie orientale, empereur, il se voit reconstituer l’empire dans son intégralité après la mort prématurée des descendants de Charles le Chauve et durant la minorité de Charles III le Simple, c’est-à-dire de 885 à 887, date à laquelle il est déposé au profit de Eudes, membre de la dynastie émergente des Robertiens. Il fut inhumé en l’abbaye de Reichenau (Allemagne) tandis que l’on peut voir à Andlau (67) la chasse contenant les restes de Richarde, son épouse répudiée, qui avait fondée l’abbaye et qui fut ultérieurement canonisée.

- Charles III le Simple (879-929) : roi de Francie occidentale de 898 à sa mort. Il retrouve son trône à la mort d’Eudes mais est déposé en 923, au profit des Robertiens. Il est inhumé en l’abbaye Saint-Fursy de Peronne (80).

- Louis IV d’Outremer (921-954) : roi de Francis occidentale de 936 à sa mort, sous la dépendance totale des Robertiens. Inhumé en l’église abbatiale de Reims (51), tout comme son épouse, Gerberge de Saxe.

- Lothaire (941-986) : roi de Francie occidentale sans pouvoir de 954 à sa mort. Inhumé en l’église abbatiale de Reims.

- Louis V le fainéant (ca967-987) : dernier carolingien a porter le titre de roi de France : à sa mort, le simulacre prend fin et Hugues Capet donne naissance à une nouvelle dynastie. Louis V est inhumé en l’abbaye Saint-Corneille de Compiègne.

à suivre : les Capétiens directs


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