COMPIÈGNE (60) : ancienne abbaye Saint-Corneille

visité en mars 2013
lundi 3 janvier 2022
par  Philippe Landru

Si un concile est organisé par Pepin le Bref à Compiègne en 757, c’est Charles II le Chauve, petit-fils de Charlemagne, qui établit progressivement à Compiègne le siège principal de son autorité royale, puis impériale : il fonde en 876 l’abbaye Notre-Dame de Carlopole, qu’il établit à l’emplacement de l’ancien palais mérovingien, tandis que lui-même se fait construire un nouveau palais situé vers l’Oise, auquel l’abbaye sert de chapelle impériale. Il s’inspire fortement du modèle de palais de son grand-père, à Aix-la-Chapelle. Il dote Compiègne de biens fonciers et de reliques prestigieuses, distraites du trésor d’Aix : le Saint Suaire (aujourd’hui disparu) et le voile de la Vierge (toujours conservé dans le sacrarium de l’église Saint-Jacques de Compiègne). S’ajoutent les corps des martyrs Cyprien, évêque de Carthage au IIIe siècle, et de Saint-Corneille, pape martyrisé en 253, donnant son nom à l’abbaye dès le Xe siècle. L’importance de ces reliques incitent les pèlerins à visiter l’abbaye.

Les successeurs de Charles II le Chauve, les Carolingiens de Francie occidentale vont continuer à considérer leurs palais de Compiègne et de Verberie et cette abbaye comme les successeurs du palais d’Aix-la-Chapelle et de la chapelle palatine. Le fils de Charles II le Chauve, Louis II le Bègue, est intronisé et sacré à Compiègne en 877, dans la chapelle palatine, où il est enterré deux ans plus tard, en 879. L’abbaye est toutefois détruite en partie par les Vikings en 882 et par des incendies en 912 et en 916. C’est encore ici que Eudes, qui est un Robertien, est élu roi des Francs et sacré le 29 février 888. Le 8 juin 979, le père de Louis V, Lothaire, l’associe au trône, et le fait couronner à l’abbaye Saint-Corneille de Compiègne. Louis V, le dernier roi carolingien, est inhumé en ce lieu en 987. La même année, c’est en son sein qu’une assemblée reconnut roi Hugues Capet. Mais, après 987, l’influence de l’abbaye diminue et devient presque uniquement provinciale : désormais le centre de gravité de la Francie occidentale se situe entre Paris, Orléans et Reims, cette rivale qui triomphe de Compiègne. C’est pourtant encore en ce lieu qu’est inhumé en 1025 le roi Hugues (II), fils de Robert II et associé au trône en 1017. Plusieurs conciles y sont organisés au Moyen-Âge, dans un contexte d’oppositions de plus en plus vives entre les autorités ecclésiastiques, la papauté, les chanoines et les bourgeois de la ville. Le dernier membre des familles royales à s’y faire inhumer, témoignant que son prestige n’avait pas totalement disparu, fut le dauphin Jean de France, fils de Charles VI, mort en 1417 à l’âge de 18 ans. Certes, en 1589, le roi Henri III fut tout d’abord inhumé dans cette abbaye, Paris, tenu par la Ligue, étant impraticable. En 1610 cependant, il put être transféré dans le caveau Valois de la basilique Saint-Denis.

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L’abbaye au XVIIe siècle

A partir du XVIe siècle, l’abbaye entame son déclin : en 1658, la reine Anne d’Autriche fait éteindre le titre abbatial, et réunit en 1658 sa mense à l’abbaye royale du Val-de-Grâce à Paris. la Révolution porte l’estocade : l’abbaye Saint-Corneille fut déclarée bien national en 1791 en même temps que celle du Val-de-Grâce. De nombreux acquéreurs achètent les bâtiments pour en faire des entrepôts. Le 10 août 1793, les sans-culottes de Compiègne envahissent l’abbaye Saint-Corneille et la pillent. Les corps des rois sont dispersés et leurs statues brûlées. Pendant cette profanation de tombes ils font connaître le même sort aux restes de seigneurs et ecclésiastiques reposant dans l’église de l’abbaye. Le Premier consul signe le décret qui ordonne la destruction de l’abbaye Saint-Corneille, mais l’édifice n’est détruit qu’en 1822. Les bâtiments encore debout de l’abbaye seront presque complètement brûlés en 1940 du fait d’un bombardement de la Luftwaffe.

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L’abbaye aujourd’hui

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Le cloître au milieu du XIXe siècle : il possède encore l’étage qui lui a été ajouté par les Mauristes vers le milieu du XVIIe siècle, qui ne survécut pas à la Seconde Guerre mondiale.

De cet imposant foyer politique et intellectuel du Haut-Moyen-Âge, il ne subsiste guère que le cloître, restauré dans son état du XIVe siècle, la base du clocher sud (XIIe), et le cellier des moines (XIVe), incorporé à la bibliothèque municipale. Après-guerre, la municipalité décida effectivement d’installer dans les vestiges de l’abbaye, la bibliothèque municipale. L’actuelle bibliothèque fut inaugurée en 2007. Une partie du cloître, restauré et restitué dans ses ornements et sa polychromie supposés du XIVe siècle, abrite depuis 2012 un musée lapidaire, dont quelques témoignages funéraires.


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samedi 29 octobre 2022

Je suis en train de remettre à jour toutes les rubriques qui listent le plus exhaustivement possible le patrimoine funéraire de tous les départements. Tous les cimetières visités par moi (ou par mes contributeurs) y sont portés, mise-à-jour des couleurs qui n’étaient pas très claires dans les versions précédentes (le noir apparaissait vert), rajout de tombes depuis les visites, photos de tombes manquantes... N’hésitez pas à les consulter pour y trouver la version la plus globale du patrimoine. Ces rubriques représentent les listes les plus complètes que l’on puisse trouver sur le net du patrimoine funéraire français.

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vendredi 14 février 2014

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