Espellette (64) - L’éternelle fiancée d’Espelette

Article de blog@sudouest.com
vendredi 26 août 2011
par  Philippe Landru

Le village épicé se situe au pied des premiers contreforts montagneux du Pays basque. Si Arcangues, la voisine, a son Luis Mariano, tombe la plus visitée du coin, Espelette possède désormais celle d’Agnès Souret, élue plus belle femme de France en 1920. Une mémoire réveillée et désormais protégée par André Darraïdou, ancien maire du village et solide restaurateur.

Evidemment, il est amoureux d’elle. Avec son doigt, André Darraïdou trace les contours de son visage, ses épaules, son corsage. Sur la photo en noir et blanc, elle a 18 ans pour l’éternité. « On n’a pas vu le temps l’abîmer », murmure-t-il. Des cheveux bouclés bruns en cascade dans le cou, des yeux de chatte et cet air langoureux propre aux jeunes filles des années 20. Elle s’appelait Agnès Souret. Et André Darraïdou, ancien maire d’Espelette, ne peut se résoudre à l’abandonner.
Cet été 1920, alors qu’un concours de la plus belle femme de France est organisé à Paris, Agnès Souret, depuis son village d’Espelette, envoie une photo d’elle en communiante, accompagnée de ce petit mot tracé à la plume : « Je n’ai que 17 ans, dites-moi si je dois traverser la France pour courir ma chance ? » Agnès, sélectionnée, fait alors l’objet d’un petit film amateur, projeté, comme celui de centaines d’autres candidates, dans les cinémas des grandes villes, à l’entracte. Le public vote pour elle, avec 114 994 voix très exactement. Car la fille d’Espelette est belle comme le jour.

Élue plus belle femme de France, elle dut se dévêtir… Un tout petit peu, ainsi que le stipulait le règlement du concours : « On met la splendeur physique au concours, du coup on force la jeune fille à se montrer (rien de méchant, la jeune fille montre ses épaules nues et le tissu de sa robe se révèle un brin léger). Le choix de la majorité des votants indiquera le type instinctif d’une nation. » En réalité, il s’agissait, au-delà de ce premier concours de miss, de dévoiler quel est le type de femme que les Français plébiscitent en 1920.
Agnès rêvait de devenir actrice à l’écran, comme Sarah Bernhardt. Son premier film fut un bide et elle tenta une carrière de modiste chez Madeleine et Madeleine. Pas terrible non plus. Finalement, comme sa mère avant elle, danseuse au ballet de Monte-Carlo, Agnès Souret se tourna vers la scène. La voilà meneuse de revue aux Folies Bergère à Paris. À Espelette, la maison de famille fut rebaptisée Ederrena, « la plus belle ». Agnès, entre ses revues et ses tournées, rentrait parfois au Pays basque. On la croisait sur la croisette de Biarritz, le long de la Grande Plage, avec son chien Cricri ou sur un cheval. Elle buvait le thé dans un service en porcelaine.
En marbre rose. C’est lors d’un voyage en Argentine qu’elle meurt d’une péritonite mal soignée, en 1928. Sans enfant après son petit quart d’heure de gloire. Pour rapatrier le corps en France, sa mère se ruina, vendit la maison Ederrena et fit construire un caveau en marbre rose, gravé à l’effigie de la jeune femme et doté d’un vitrail exceptionnel [1], dans un coin du petit cimetière d’Espelette. Voilà la triste histoire d’Agnès.

André Darraïdou la connaît dans tous ses détails. Alors, encore maire, il invita l’architecte des Bâtiments de France à venir voir la tombe d’Agnès, avec dans l’idée de la faire inscrire à l’inventaire des Monuments historiques, afin de la restaurer. Il ne fallait pas que la mémoire de la belle fille se dissipe. C’est fait. « En 2002, nous avons organisé une petite fête, reprend-il, avec une exposition, un repas, tout bien comme on fait ici. Puis nous avons invité une Miss France, car après tout Agnès fut une espèce de Miss France. Là, on a un peu ramé… Chère, très chère, la Miss France. Donc on a pris une ancienne, une d’il y a dix ans qui rentrait dans nos prix. Les gens ont adoré retrouver cette histoire et, aujourd’hui, nul n’ignore à Espelette qui était Agnès Souret.  »

En cette semaine pluvieuse du mois d’août, les touristes se bousculent dans les petites rues du village. Les cabas remplis de piments, ils galopent d’une boutique de spécialités locales à déguster à l’autre. Mitraillent les façades des hautes maisons. Tellement typiques et pittoresques. Sans même se douter qu’au cœur du cimetière, derrière les stèles discoïdales du XVIe siècle, gît une jeune femme dans un tombeau rose.

Isabelle Castéra


[1Elle fut inhumée dans une tombe Art Déco réalisée par le sculpteur Lucien Danglade, élève de Charles Despiau. C’est un petit édifice évoquant un édicule antique, en marbre rose, décoré d’un vitrail.


Commentaires

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ESPELETTE (64) - L’éternelle fiancée d’Espelette
mardi 23 décembre 2014 à 09h05 - par  darozteguy

la mère d’Agnès Souret n’a jamais été danseuse à l’Opéra de Monte Carlo et n’a pas été
« l’amie » d’un riche prince oriental vivant sur la Cote d’Azur.
Tout ceci n’est qu’affabulation d’une journaliste locale trop crédule
La vie de ces trois femmes à Bayonne,à Bordeaux, à Espelette est bien connue

Site web : Agnès Souret
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ESPELETTE (64) - L’éternelle fiancée d’Espelette
mercredi 2 mai 2012 à 16h03 - par  Arnaud Darozteguy

Agnes Souret est née le 21 janvier 1902 à Bayonne (64) au Numéro 32 Remparts LACHEPAILLET
fille illégitime de Marguerite SOURET, 20 ans non mariée domiciliée à Bayonne

(Référence : Etat Civil de Bayonne acte N°35 année 1902)
mention marginale sur l’acte de naissance : décédée en République Argentine en septembre 1928(pas d’indication de la date exacte)

Jeanne Germaine Berthe Agnès SOURET n’est donc pas née à Espelette ou Biarritz.
Le nom de son géniteur n’a jamais été révélé.

Sa mère Marguerite Souret a reconnu Agnès pour sa fille naturelle le 10 OCTOBRE 1907-
(mention marginale sur acte de naissance)

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