Vouziers (08) : cimetières du Vouzinois
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L’historien Gilles Déroche a réalisé, il y a des années, le tour des 125 cimetières de l’arrondissement. Sculptures notables, épitaphes marquantes… Pour la Toussaint, il nous dit tout.
Vous avez publié dans le n° 72-73 d’Horizons d’Argonne (1996) une « ethnologie des cimetières du Vouzinois ». Pourquoi cette étude ?
• G.D. : « C’est un endroit qui est quand même négligé et très révélateur de notre mode de vie. Je vais souvent dans les cimetières parisiens, comme le Père Lachaise ou Montmartre, où j’ai beaucoup de copains… dont Dalida ! »
Et dans le Vouzinois ?
• G.D. : « L’idée m’est venue d’une visite à Briquenay. J’ai découvert la tombe d’un jeune ingénieur… une très belle sculpture. J’ai fouillé systématiquement les 125 cimetières du Vouzinois, tombe par tombe… Ça a pris trois ans ! »
Que cherchiez-vous ?
• G.D. : « Tout ! Épitaphes, particularités, personnalités, sculptures… J’ai remarqué, par exemple, que les curés sont souvent enterrés au centre des cimetières, comme le berger au milieu de son troupeau. »
Quelles personnalités reposent dans les cimetières du secteur ?
• G.D. : « On trouve le général Chanzy et le professeur Gilbert à Buzancy, Jules Courtehoux à Tannay, Raymond Lefèvre à La Sabotterie, François Sommer à Belval-Bois des dames, Paul Martin au Chesne, le docteur Beaudier à Givry-sur-Aisne… Les personnalités peuvent avoir une tombe tout à fait modeste, comme Lucien Hubert au Chesne ou Guy Desson. »
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué ?
• G.D. : « Les tombes les plus intéressantes sont celles avec des sculptures, parce que les gens ont voulu exprimer quelque chose. Certains ont fait une sépulture pour leur épouse. Et les tombes d’enfants sont toujours émouvantes… même si les monuments sont stéréotypés, souvent des anges en porcelaine. À part cela, tous ont bien sûr été « bons pères » : les morts sont tous de braves gens, comme disait Brassens ! »
Fait-on preuve de dérision sur les monuments des cimetières vouzinois ?
• G.D. : « Non, je n’ai pas trouvé de traces d’humour comme à Paris. Il n’y a pas ici d’équivalent à Francis Blanche, dont l’épitaphe dit : « Laissez-moi dormir, j’étais fait pour ça ». Par contre, à Suzanne, j’ai vu deux monuments l’un devant l’autre. Les gens m’ont expliqué qu’une haine familiale avait conduit à vouloir cacher le premier avec le second ! »
Quels sont les cimetières que vous avez préférés ?
• G.D. : « Le plus intéressant est celui de Buzancy, avec les tombes de 1870, l’enclos Gobron, le professeur Gilbert, le général Chanzy ou la chapelle Féraud. Le plus bucolique est celui d’Autry, très bien restauré. »
On vous souhaite d’avoir le temps d’y songer, mais votre enquête vous a-t-elle donné des idées pour votre dernière demeure ?
• G.D. : « L’épitaphe pourrait être « Ci-gît l’Déroche » ! Plus sérieusement, je souhaite être incinéré et que mes cendres soient dispersées sur la clairière de Saint-Rouin. »
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